Thomas Sankara : déjà 30 années !

 A l’occasion de la commémoration du 30e anniversaire de l’assassinat du président Thomas Sankara, sa veuve Mme Mariam Sankara,au nom de la famille, salue l’initiative du mémorial Thomas Sankara.

Elle précise qu’elle ne veut pas qu’il soit érigé au sein du conseil de l’Entente, "qui rappelle de douloureux souvenirs en raison des assassinats et des tortures qui ont marqué ce lieu".Mme sankara

Mme Sankara@ms

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, Chers amis,

L’assassinat du Président Sankara et de ses compagnons, le 15 octobre 1987, a interrompu une expérience de développement originale et prometteuse de l’histoire de l’Afrique contemporaine.

Je tiens à vous remercier pour votre soutien à toute la famille Sankara et à moi-même ainsi que pour votre fidélité à la mémoire du Président Thomas Sankara.

A travers sa politique, Thomas a défendu, en donnant lui-même l’exemple, les valeurs essentielles telles que l’intégrité, l’honnêteté, l’humilité, le courage, la volonté, le respect et la justice. En mobilisant les différentes composantes de la société, il s’est battu, de façon acharnée, contre la dette, pour le bien être de tous les burkinabè, la promotion du patrimoine culturel burkinabè et l’émancipation de la femme. Il a incité ses concitoyens à se prendre en charge pour vivre dignement. Bref, il a refusé la soumission au diktat des plus puissants de ce monde, a pris la défense des plus faibles et des plus défavorisés.

Imprégnés de ces valeurs et de ces idées, vous avez, à travers l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, mis fin au régime dictatorial de Compaoré. Cette insurrection a permis au peuple de reprendre la parole pour exiger, entre autres, la fin de l’impunité, la réouverture du dossier de justice sur l’assassinat de Thomas Sankara et ses compagnons, celui de Norbert Zongo et tant d’autres.

La décision prise au Burkina Faso par les autorités de la transition de rendre enfin justice à Thomas Sankara a suscité un immense espoir au Burkina, en Afrique en général et dans le monde. Mais on est toujours dans l’attente de la justice.

La requête de la société civile et des familles est claire. Nous voulons connaître au plus vite les commanditaires et les exécutants de cet assassinat et ceux des autres crimes.
Retarder la quête de vérité, c’est jouer le jeu des assassins de Thomas Sankara et de ses compagnons. Ne pas rendre justice, c’est refuser une sépulture digne pour Thomas Sankara et ses compagnons, c’est empêcher les familles de faire leur deuil.

C’est la raison pour laquelle, le peuple burkinabè et ses amis doivent rester mobilisés et relancer la campagne pour que trente ans après, justice soit enfin rendue à Thomas Sankara et à ses compagnons.

Chers compatriotes, notre famille salue votre initiative visant à ériger un mémorial à la mémoire de Thomas Sankara.

Nous sommes attachés, comme nombre de nos compatriotes, à la défense et à la sauvegarde de la mémoire de Thomas Sankara. Je tiens à saluer cette initiative de la société civile, conduite par l’association CIMTS -comité international pour le Mémorial Thomas Sankara-. Ce projet de Mémorial bénéficie du soutien populaire. Une démarche consensuelle et inclusive devrait permettre de réaliser un ouvrage de qualité qui témoignera de la vitalité des idées de Thomas et de ses fidèles compagnons de la révolution du 4 août 1983. Toutefois, la famille tient à ce que ce mémorial ne soit pas construit dans l’enceinte du conseil de l’Entente qui rappelle de douloureux souvenirs en raison des assassinats et des tortures qui ont marqué ce lieu.

Avec toutes ces volontés de valorisation de la mémoire de Thomas observées à travers le monde, on se rend compte avec le temps que Thomas Sankara était un visionnaire. Conscient des actions des détracteurs de la révolution, il savait qu’il était incompris parce qu’il était en avance sur son temps. Il dira alors :  "tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront". Ceci est devenu une réalité. On constate aujourd’hui que la jeunesse s’imprègne de ses idées progressistes pour transformer la société.

Trente après sa disparition, la pensée de Thomas reste vivante et d’actualité.
Encore une fois, je vous félicite pour votre mobilisation et pour votre fidélité à la mémoire du président Thomas Sankara.

30 ans de résistance !
30 ans d’impunité !
Rendez enfin justice à Thomas Sankara et ses compagnons ainsi qu’à toutes les victimes des crimes impunis !

La patrie ou la mort, nous vaincrons !

Je vous remercie.

Madame Mariam Sankara

Montpellier - France, le 15 octobre 2017

Citations de Thomas Sankara

Citations de Thomas Sankara Declaration sa kara

  • L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir. Seule la lutte libère…
  • Ceux qui nous ont prêté de l’argent, ce sont eux qui nous ont colonisés.
  • Nous sommes étrangers à la dette, nous ne pouvons donc la payer !
  • La dette ne peut pas être rembourser parce que d’abord si nous ne payons pas, les bailleurs de fonds ne mourront pas. Soyons-en sûrs. Par contre, si nous payons, c’est nous qui allons mourir. Soyons-en sûrs également.
  • La libération de la femme : une exigence du futur !
  • Un homme, si opprimé soit-il, trouve un être à opprimer : sa femme !
  • La vraie émancipation de la femme, c’est celle qui responsabilise la femme !
  • Ni le coran, ni la bible, ni les autres n’ont jamais pu réconcilier le riche et le pauvre !
  • Nous avons besoin d’un peuple convaincu plutôt que d’un peuple vaincu !
  • Ceux qui veulent exploiter l’Afrique sont les mêmes qui exploitent l’Europe !
  • Nous ne pouvons laisser à nos seuls ennemis d’hier et d’aujourd’hui le monopole de la pensée, de l’imagination et de la créativité !
  • Comptons sur nos propres forces !
  • Tuez Sankara, des milliers de Sankara naîtront !
  • Vivre avec les masses, vaincre avec les masses !
  • Le système néocolonial tremble quand le peuple devenu maître de sa destinée veut rendre sa justice !
  • Les trois luttes : Lutte contre la désertification, les feux de brousse et la divagation des animaux.
 

Extraits des grands discours de Thomas Sankara Sankara et khadafiThomas Sankara et le colonel Mouammar Kadhafi@ema

-"Tant qu’il y aura l’oppression et l’exploitation, il y aura toujours deux justices et deux démocraties : celle des oppresseurs et celle des opprimés, celle des exploiteurs et celle des exploités. La justice sous la révolution démocratique et populaire sera toujours celle des opprimés et des exploités contre la justice néo-coloniale d’hier, qui était celle des oppresseurs et des exploiteurs."

 

-"Il n’y a pas de révolution sociale véritable que lorsque la femme est libérée. Que jamais mes yeux ne voient une société où la moitié du peuple est maintenue dans le silence. J’entends le vacarme de ce silence des femmes, je pressens le grondement de leur bourrasque, je sens la furie de leur révolte. J’attends et espère l’irruption féconde de la révolution dont elles traduiront la force et la rigoureuse justesse sorties de leurs entrailles d’opprimées."

- "Le pillage colonial a décimé nos forêts sans la moindre pensée réparatrice pour nos lendemains"

- "Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous les modèles que tous les charlatans de même acabit ont essayé de nous vendre 20 années durant. Il ne saurait y avoir pour nous de salut en dehors de ce refus là. Pas de développement en dehors de cette rupture là. Il faut ranimer la confiance du peuple en lui-même en lui rappelant qu’il a été grand hier et donc, peut-être aujourd’hui et demain. Fonder l’espoir."

- "La plus grande difficulté rencontrée est constituée par l’esprit de néo-colonisé qu’il y a dans ce pays. Nous avons été colonisés par un pays, la France, qui nous a donné certaines habitudes. Et pour nous, réussir dans la vie, avoir le bonheur, c’est essayer de vivre comme en France, comme le plus riche des Français. Si bien que les transformations que nous voulons opérer rencontrent des obstacles, des freins".

- "L’esprit de liberté, de dignité, de compter sur ses propres forces, d’indépendance et de lutte anti-impérialiste doit souffler du Nord au Sud, du Sud au Nord et franchir allègrement les frontières. D’autant plus que les peuples africains pâtissent des mêmes misères, nourrissent les mêmes sentiments, rêvent des mêmes lendemains meilleurs".

Biographie de Thomas Sankara

Thomas Sankara, est né le à Yako en Haute-Volta et mort assassiné le à Ouagadougou au Burkina Faso.Thomas sankara

Thomas Sankara@eo

Thomas Sankara est un homme d'État anti-impérialiste, panafricaniste et tiers-mondiste voltaïque, puis burkinabè, chef de l’État de la République de Haute-Volta rebaptisée Burkina Faso, de 1983 à 1987.

En septembre 1981, il devient secrétaire d'État à l'Information dans le gouvernement du colonel Saye Zerbo avant de démissionner le 21 avril 1982, en direct à la télévision, déclarant : "Malheur à ceux qui bâillonnent le peuple"

Le 7 novembre 1982, un nouveau coup d'État porte au pouvoir le médecin militaire Jean-Baptiste Ouédraogo  Thomas Sankara devient premier ministre en janvier 1983, position acquise grâce au rapport de forces favorable au camp progressiste au sein de l’armée, mais il est limogé et mis en résidence surveillée le 17 mai 1983, probablement sous la pression de la France.

Il est le président du pays durant la période de la première révolution burkinabè du au 15 octobre 1987, qu'il finit par totalement incarner. Durant ces 4 années, il mène à marche forcée, et y compris en recourant à la répression de certains syndicats ou organisations politiques rivales, une politique d'émancipation nationale (qui passe par exemple par le changement du nom de Haute-Volta issu de la colonisation en un nom issu de la tradition africaine : Burkina Faso, qui est un mélange de moré et de dioula et signifie "Pays des hommes intègres", de développement du pays, de lutte contre la corruption ou encore de libération des femmes.

Thomas Sankara est devenu gênant, du fait de sa lutte contre le néocolonialisme, menaçant la place de la France en Afrique ainsi que le pouvoir des autres chefs d'État d'Afrique de l'Ouest, au comportement plus docile. Le 15 octobre 1987, Thomas Sankara est assassiné lors d'un coup d'État organisé par un de ses camarades les plus proches, Blaise Compaoré, plus disposé à soutenir les intérêts de la France, de la Côte d'Ivoire de Félix Houphouët-Boigny et de la Libye de Mouammar Kadhafi, qui soutiennent ce renversement. Quelques jours plus tard, il est déclaré "décédé de mort naturelle" par un médecin militaire.

Les responsables et les circonstances de sa mort restent assez mystérieux. Le gouvernement français de l'époque — un gouvernement de cohabitation avec Jacques Chirac, premier ministre et François Mitterrand président de la République - ainsi que plusieurs autres gouvernements africains proches de la France sont ainsi soupçonnés d'avoir soutenu cet assassinat, de même que Kadhafi.Sankara et compaore

Thomas Sankara et Blaise Compaoré@ema

Son frère d'armes, Blaise Compaoré, qui lui succède à la tête du Burkina Faso, est soupçonné d'être le principal responsable de son assassinat. Thomas Sankara et certains de ses camarades tués lors du coup d'État seraient enterrés sans tombe au cimetière de Dagnoën à Ouagadougou.

Le , pour la première fois depuis 2007, Mariam Sankara sa veuve revient à Ouagadougou après le renversement de Blaise Compaoré pour être entendue par le juge chargé d'enquêter sur la mort de son mari, et elle est accueillie par plusieurs milliers de personnes. Des doutes subsistent sur le lieu véritable de la sépulture de Sankara et en mai 2015, un juge burkinabè ordonne l'exhumation de corps du cimetière de Dagnoën pour déterminer s'il s'agit de Sankara et quelles sont les conditions de sa mort. Le , Gilbert Diendéré auteur du putsch raté de 2015 au Burkina Faso, est inculpé pour complicité dans l’assassinat de Thomas Sankara, le

reste vivace dans la jeunesse burkinabé et plus généralement en Afrique, qui en a fait une icône, un "Che Guevara africain", aux côtés notamment de Patrice Lumumba.