Centrafrique : le fiasco d'une opération militaire conjointe confirme la trajectoire funeste d'un quinquennat confié démocratiquement par le peuple

Bernard selemby 13Le feuilleton de la crise politico-militaire centrafricaine perdure et se pérennise au point d’agacer la population, les partenaires au développement ainsi que la solidarité internationale. 

Sur l’ensemble du territoire national, le quotidien des centrafricains est cadencé ou rythmé par une série de violences cycliques assorties de déplacements en masse en quête d’une terre de refuge sécurisée.

Les nouvelles autorités démocratiquement élues ont privilégié le dialogue pour résoudre l’énigme sécuritaire mais visiblement, cette option conforte les groupes armés non conventionnels dans leur posture de défier de façon ostentatoire l’autorité de l’Etat. Les agacements sans cesse croissants de la population de l’enclave du Km5 ont motivé la MINUSCA au nom du principe de subsidiarité de planifier une opération militaire conjointe avec l’armée centrafricaine pour démanteler les quartiers généraux des groupes d’autodéfense qui dictent leur loi sur le lopin de terre abandonnée qui représente le poumon économique de la capitale centrafricaine.                                           Bernard Selemby-Doudou@bsd

Cette opération militaire conjointe, naturellement mal préparée et mal organisée s’est heurtée à une résistance inattendue des groupes d’autodéfense créant en conséquence un lit à la débandade et à la psychose.

Les pertes en vies humaines sont innombrables car au bout d’une semaine de combats et en dépit des milliers de balles tirées par les belligérants, aucun bilan exhaustif n’a été présenté par les autorités ni par la Croix rouge centrafricaine.

Apeuré comme à son habitude, le citoyen lambda s’interroge :

  • Comment une opération militaire de cette envergure, planifiée dans le grand secret peut-elle être sanctionné par un échec ?
  • Qu’est-ce qui peut justifier légitimement la déroute des forces onusiennes qui ont une puissance de feu inégalable ?
  • Sommes-nous dans quelle société où les mercenaires étrangers imposent leur loi à un État dit souverain ?
  • Quelles sont les réactions conséquentes des autorités politiques compétentes ?
  • Où est passé la ministre de la défense nationale qui est totalement transparente nonobstant son expérience avérée des dossiers militaires ?
  • Comment les médias français ont réussi à interviewer l’ennemi alors que les forces de l’ordre n’ont pas réussi à le localiser ni à le mettre hors d’état de nuire ?
  • Pourquoi le président de la République refuse t-il de s’inscrire dans la logique de guerre ?
  • Qu’avez-vous fait de la célèbre maxime qui dit : "qui veut la paix, prépare la guerre" ?
  • Et si le cœur des institutions étatiques est atteint par les fossoyeurs de la République, maintiendrez-vous toujours la logique du dialogue au lieu de vous défendre légitimement ?
  • La sortie médiatique de trois minutes d’ores déjà maladroite du premier ministre car vide de contenu était-elle l’idéale dès lors que le premier ministre n’est responsable que devant le président de la République et l’Assemblée nationale conformément aux dispositions de l’article 53 alinéa 1 de la constitution ?

 

Nous saisissons l’opportunité pour apprécier l’adresse même tardive du président de la République à la nation qui met un accent particulier sur le principe de laïcité prédisposé par le préambule de la constitution du 30 mars 2016. Dans la détresse de la population, le président de la République n’a évoqué la situation du Km5 auparavant que lors de la rencontre avec les diplomates de l’ONU et de l’Union africaine, déplorable.

Au delà de ce qui précède, nous condamnons avec la dernière rigueur toutes velléités de récupération politique des événements du Km5 par la classe politique, les parlementaires, la société civile et même au niveau de la sous région. Nous appelons ceux ou celles qui se réclament centrafricains ou centrafricaines de faire bloc derrière le président de la république afin de mettre hors d’état de nuire les fossoyeurs de la république. Nous rappelons en outre que l’intérêt général prime sur les querelles intestines, stériles et égoïstes.

Pour finir, il est important de rappeler qu’avoir un regard critique sur la gestion de la chose publique ne fait pas du citoyen lambda un opposant ni un partisan de non progrès. Nous ne nions pas qu’il y a des avancées significatives dans différents domaines mais le volet sécuritaire fait de l’ombre à ces efforts.

Aux dernières nouvelles, nous apprenons le limogeage du ministre de l’administration du territoire qui est un non événement, nous l’avions déjà prévenu dans nos précédents articles. Ce n’est pas ce que le peuple attend des nouvelles autorités c’est le système qui est grippé et pour redonner une chance au retour de la paix, nous demandons avec insistance la démission du premier ministre ainsi que de son gouvernement.

À défaut de ce qui précède, nous appèlerons la population de s’organiser en bande rangée et de marcher pacifiquement sur la primature. Nous estimons que si le président de la République n’arrive pas à limoger son ami de longue date et de choisir librement un nouveau chef du gouvernement, la rue finira par lui imposer une belle cohabitation.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 13 avril 2018

Bernard Selemby-Doudou