Centrafrique : le maire de Bangui jettera-t-il l’éponge au bout de combien de rounds de pratiques mafieuses ?

Bernard selemby 8Entre les deux tours des présidentielles, la vingtaine des candidats malheureux s’est muée en sympathisants à travers des alliances contre nature. Animé majoritairement par le souci de partager le gâteau, le collectif du 0% a proposé ses services à l’élu de la nation qui, sans s’interroger sur le bien fondé de ces alliances a opté de piétiner les besoins primaires du peuple au bénéfice de ses soutiens.

C’est ainsi qu’après la prestation de serment et la mise en place du gouvernement, le maire de la ville de Bangui a été désigné par décret présidentiel le 6 mai 2016. Logiquement, le maire qui depuis des décennies est nommé par le président de la république est une autorité communale élue par le conseil municipal et tout cela par le biais d’une élection municipale qui tarde à voir le jour alors qu’elle est prévue par les textes en vigueur.                                                                 Bernard Selemby-Doudou@bsd

Le maire exécute sous contrôle du conseil municipal les délibérations de ce dernier. Premier citoyen et premier représentant de l’Etat dans la ville, le maire est chargé de l’exécution des mesures administratives, de mesures de sûreté générale, du maintien de l’ordre public local à travers son pouvoir de police administrative. La gestion des maternelles, des crèches, voiries, l’assainissement de la ville, les pompes funebres, l’éclairage public, les panneaux publicitaires etc, relèvent en général de la compétence de la municipalité. Ordonnateur principal des dépenses municipales, la ville de Bangui estimée au tiers de la population centrafricaine centralise les activités des 8 arrondissements et jouit d’une autonomie de gestion. En outre, la mairie de Bangui reçoit traditionnellement et en plus de ses recettes propres des aides de l’Etat ainsi que des fonds provenant des partenaires au développement.

À l’orée de deux ans de gouvernance, la gestion du premier citoyen de la ville de Bangui est caractérisée par un amateurisme poussé à l’extrême, le népotisme galopant, le laxisme, le clientélisme, des voyages abusifs et budgétivores sur des fonds publics, et surtout son goût démesuré des affaires.  Agacé, le citoyen lambda, adepte de la bonne gouvernance s’évertue à comprendre en s’interrogeant :

  • Après plus de trois semestres de drapeau autour de la ceinture, peut-on esquisser un bilan en faveur de la municipalité ?
  • Depuis son arrivée, qu’est-ce qui a sensiblement changé ?
  • Le budget prévisionnel de l’exercice était-il conséquent pour mener à bien ses missions ?
  • L’existence avérée d’une caisse parallèle à la caisse publique est-elle la règle ?
  • Comment les différentes aides de l’Etat et fonds de partenaires sont-ils gérés ?
  • Existe t-il une traçabilité ou un brin de transparence dans la gestion des fonds communaux ?
  • Tous les engagements financiers de la municipalité sont-ils fait avec l’assentiment du conseil municipal ?
  • Les inombrables recrutements hors personnels communaux sont-ils en adéquation avec le budget prévisionnel ?
  • Les recrutements taxés de népotisme ont-ils respecté les textes en vigueur ?
  • Les recrutements sont-ils fait en coordination avec les services compétents de la mairie ?
  • Quels sont les apports des voyages abusifs et budgétivores pour la municipalité ?
  • Par ailleurs, qu’en est-il de la convention de transport urbain avec la société Benafrique ?
  • Pourquoi les vingtaines de maires qui se sont succédés baignent toujours dans des malversations financières ?
  • Pourquoi ils ne se démarquent jamais de leurs prédécesseurs ?

À l’instar de l’ancien maire de Dakar au Sénégal, aucun des maires qui se sont succédés n’a été inquiété par une quelconque procédure alors que des malversations financières se comptent par dizaine. On ne se prive pas également de rappeler les autorités sur une question primordiale. À quand les élections municipales prévues par l’agenda de la rupture ?

Emile gros nakombo 2Le pouvoir discrétionnaire du président de la République qui lui permet de nommer une personnalité de son choix en dépit de sa moralité, cause à certains égards des préjudices aux intérêts du peuple. Toutes ces pratiques mafieuses sont rendues possibles parce que les maires ne sont pas élus…donc pas de majorité ni de l’opposition pour jouer le contrepoids au niveau du conseil municipal. Ainsi le premier citoyen est libre de nommer ses acolytes comme collaborateurs et l’équation mafieuse devient juste, légitime et légale.

  • Sachant que l’actuel maire fut par deux fois candidats malheureux aux présidentielles antérieures, s’agissait-il d’une course à la récupération de dépenses des précédentes campagnes ?
  • Mais le maire et ses acolytes ont-ils les compétences et qualités requises pour occuper ces postes ?
  • Leur affection pour les affaires n’était-elle pas connue des autorités de la rupture ?

Aux dernières nouvelles, deux containers destinés à la municipalité se retrouvent curieusement devant le domicile du premier citoyen…chut, peut-être que l’endroit est bien indiqué pour le stockage de matériels municipaux.

Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

Emile Gros Raymond Nakombo@dsvb

Paris le 9 février 2018

Bernard Selemby-Doudou

Juriste, administrateur des élections.