Les années Bozizé 1/4 : un nouveau régime en quête de légitimité

Par Thierry Simbi

Un dialogue National ouvre la voie à une période de transition.

Au lendemain du putsch du 15 mars 2003, il règne un calme très relatif dans la capitale centrafricaine. Le général Bozizé appelle dans une première déclaration radiodiffusée « tous les militaires, gendarmes, et gardes de l'armée nationale de rejoindre dans les plus brefs délais leurs caserne s». Le porte-parole des rebelles, Parfait Mbay déclare que son mouvement souhaité l’instauration d’une « transition collective » et qualifie le chef de la rébellion de « président Bozizé ».

Dès le 18 mars, les Premiers Ministres du Congo et du Gabon au nom de la CEMAC viennent à Bangui rendre hommage au « nouveau Président » adoubant ainsi symboliquement le putschiste tandis que l’ambassadeur français Dominique Boché rencontre François Bozizé. Installé au camp Bréal, le nouvel homme fort de Bangui reçoit l’allégeance des chefs militaires encore en place.

Le 20 mars, le professeur Abel Goumba déclare que la prise du pouvoir du général Bozizé ne peut pas être considérée comme un véritable coup d’Etat évoquant plutôt une « révolution populaire qui a permis de débarrasser le pays d’un dictateur qui a fait vivre la population dans des conditions misérables ». Dans un discours à la nation le soir du 20 mars à la radio nationale Bozizé affirme « je suis venu sauver le peuple centrafricain. Et après, ma mission s'arrête là. » Il justifie l'action des rebelles par la situation d'extrême pauvreté qui se répandait dans tout le pays et fait une évaluation catastrophique du régime précédent. Le Président autoproclamé annonce le « retour de la paix et de la démocratie », mais souhaite avancer « par étapes » et via la mise en œuvre d’un « rassemblement national. » Il suspend la constitution, dissout l'Assemblée nationale tout en maintenant les partis politiques existants et annonce qu’il se réunira avec eux pour s'entendre sur un programme minimal à mettre en œuvre. Il appelle à la création d'un « conseil national de transition regroupant les forces vives de la nation », au sein duquel « les anciens chefs d'Etat siègeront en qualité de membres d'honneur ». Même si prise de Bangui s’accompagne de scènes de liesses dans les rues où la population exprime sa joie et son espoir dans un avenir meilleur, les administrations publiques, les villas des dignitaires de l’ancien régime mais aussi les commerces et les entreprises seront pillées non seulement par les libérateurs qui se remboursent en pays conquis mais aussi par certains compatriotes qui profitèrent de la situation de chaos, au point où François Bozizé doit faire appel au président Idriss Déby, qui lui envoie, le 19 mars, 500 soldats pour rétablir l’ordre dans sa capitale. Environ 150 hommes de ce corps expéditionnaire tchadien intègreront ensuite la force régionale de la CEMAC, dont le mandat inchangé est renouvelé, le 22 mars, et dont les effectifs sont renforcés. La France maintient ses 300 hommes à l’aéroport de Bangui en charge de l’évacuation de ses ressortissants et annonce qu’elle poursuivra sa mission d’assistance logistique au contingent de la CEMAC. Cependant, dans les faits, cette opération baptisée « Boali » sera rapidement transformée en Détachement d’instruction opérationnelle pour aider à la stabilisation du nouveau régime. L’armée française fait son retour en République Centrafricaine.

Le 23 Mars, radio Centrafrique reprend ses activités normales. Le chef de l’État autoproclamé annonce la composition de son gouvernement. Il fait appel à Abel Goumba pour conduire une transition consensuelle en tant que Premier Ministre. Ce choix de l’opposant historique Abel Goumba, compagnon de route du père-fondateur de la Centrafrique indépendante Barthélémy Boganda, surnommé à Bangui « Mr mains propres » rassure les observateurs sur les intentions du nouveau régime. François Bozizé est dans ce nouveau gouvernement non seulement Président de la République mais aussi ministre de la Défense. Abel Goumba en est lui Premier Ministre et aussi Ministre en charge de l'Économie et des Finances au sein d’un gouvernement composé de différentes personnalités dont notamment Karim Meckassoua qui hérite du Ministère des Affaires étrangères, Sylvain N'Doutingai, du Ministère de l'Energie et des Mines ou encore Parfait M'Bay, du Ministère de la Communication. Outre la composition de ce premier gouvernement, un Dialogue National est annoncé pour apurer les comptes du passé et plusieurs exilés politiques comme Charles Massi et Charles Armel Doubane font leur retour au pays à bord du premier vol Air France depuis le putsch. Le retour de l’ancien Premier Ministre Jean-Paul Ngoupandé est annoncé, en même temps que celui de l’ancien président Kolingba, toujours réfugié en Ouganda mais désormais autorisé à rentrer lui aussi à Bangui.

Le 2 Avril, le Premier ministre Abel Goumba demande à tous ses ministres de faire une déclaration de patrimoine avant de prendre leurs fonctions avançant qu’il « ne faut pas qu’on nous taxe demain de détournements ».

Le 4 Avril, la garde présidentielle est dissoute et remplacée par une unité spéciale affectée à la sécurité présidentielle. L’ancien chef de la garde présidentielle Ferdinand Bombayaké trouve refuge dans une ambassade étrangère.

Le 10 Avril, un Conseil National de Transition (CNT) est mis en place par décrét présidentiel. Sa mission est « d’assister le président dans les fonctions législatives et examinant les lois qui lui sont présentées » et « d’offrir aux président ou au gouvernement toutes les recommandations qu’il etime dans l’intérêt de la nation » de même que assister le gouvernement dans sa tâche de rédiger une nouvelle constitution et de commencer à réfléchir à la préparation des prochaines élections. » Il faut rappeler que l’idée de mettre en place un CNT avait germé après échanges avec Sonny Colé et suites aux écrits de Henri Grothe, Serge Bozanga, Claude Lenga, Narcisse Komas et Crépin Mboli-Goumba qui publient une série d'articles sur l'Après-Patassé. Le journal Le Citoyen donna écho à ces articles que l’on peut aujourd’hui retrouver via le lien suivant https://www.sangonet.com/FichParti…/TransitionAlternRCA.html. Outre la mise en place du CNT, le Président annonce que grâce au soutien de la république populaire de Chine, les arriérés de salaire seront payés dans la semaine. Le 6 Mai, le Premier Ministre Goumba entame une tournée internationale. A Paris, il rencontre le Ministre des affaires Etangères et celui de la coopération, ce qui acte de facto la reconnaissance du nouveau régime par Paris.

Le 30 Mai, le CNT composé de 98 membres est mis en place à Bangui.

Le 3 juin, les chefs d’État de la CEMAC, réunis en sommet, reconnaissent officiellement les nouvelles autorités à Bangui. Le 15 Juin, Nicolas Tiangaye est élu président du CNT par ses pairs. Le 29 juillet, Dominique de Villepin, alors le chef de la diplomatie française, se rend sur les rives de l’Oubangui pour confirmer l’engagement de la France aux côtés de la Centrafrique.

Le 11 Août, le CNT vote contre la participation d’Ange-Félix Patassé, réfugié au Togo au Dialogue National. Bozizé nomme onze membres d’un bureau de Comité préparatoire à ce dialogue présidé par le pasteur Isaac Zokoué qui avait déjà été le chef d’orchestre de la Conférence de réconciliation nationale organisée en 1998 après les mutineries de 1996-97.

Le 26 Août, le procureur de Bangui annonce que la justice centrafricaine lance un mandat international contre l’ancien président Patassé pour « crimes de guerre, assassinats, viols, intelligence avec une puissance ennemi, détournements de fonds » et autres lourdes accusations.

Le 2 Septembre, l’ancien président Patassé en exil au togo réplique et dépose plainte à son tour contre le général Bozizé pour crimes de guerre devant la cour pénale internationale. Le 8 Septembre, le chef de l’Etat autoproclamé inaugure le Dialogue National qui réunit à Bangui 350 délégués censés représenter toutes les strates de la société centrafricaine. Selon le président Bozizé, cette grand-messe entre politiciens, militaires, gens d’églises, commerçants, étudiants ou associations de femmes doit être « un conclave de réconciliation pour que «la République centrafricaine renaisse de ses cendres ». L’ancien président Patassé est exclu tandis que Kolingba est absent, poursuivant son exil ougandais, malgré l’amnistie et les appels du pied présidentiel du général Bozizé. Ce Dialogue National voit notamment l’ancien Président Dacko affecté par la maladie et ne pouvant se tenir debout, faire délivrer un message par un de ses proches, Didier Bongolapé. « Je voudrais à cet instant solennel présenter à l'endroit de M. Abel Goumba et de sa famille, et de ses amis politiques, toutes mes excuses du fond du cœur, pour les désagréments ordonnés au nom de l'Etat dans ces périodes difficiles de l'après-Boganda, où nous tâtonnions tous pour essayer de lui succéder et je demande solennellement pardon pour les actes et les insuffisances que j'ai eus à poser dans le cadre des hautes fonctions que j'ai occupées » indique M. Dacko dans son message. Ce message entrecoupé d'applaudissements a été suivi par celui d'Abel Goumba, qui a toujours imputé à son principal adversaire politique les dérives de la Centrafrique, après la mort du président Boganda en 1959. Malgré des discussions intéressantes, c’est aussi pour complaire aux bailleurs de fonds que Bozizé alors en quête de légitimé sur la scène internationale a repris à son compte l’idée de ce Dialogue National qui durera jusqu’au 27 Octobre.

Le 8 octobre, le général français Jean-Pierre Pérez est nommé conseiller en matière de défense de François Bozizé. Il restera conseiller militaire chargé de la garde du chef de l’Etat jusqu’en 2006. Cet officier de la Légion étrangère connait la Centrafrique pour y avoir commandé à la fin des années 1990 les Eléments français d'assistance opérationnelle (EFAO), un contingent militaire français de 1.200 hommes présent dans le pays de 1981 à 1998. Le général Henri-Alain Guillou est lui nommé conseiller à la défense du président François Bozizé, en charge non seulement de la formation des cadres militaires, des grandes réformes au sein de l'armée et de la gendarmerie, en vue de sécuriser le pays avant les élections de 2005 sensées marquer la fin de la transition. La coopération militaire avec la France est ainsi relancée.

Le 20 Novembre, l’ancien Président Dacko décède à Yaoundé alors qu’il s’apprétait être être évacué en France pour être hospitalisé. Depuis son deuxième départ du pouvoir en 1981, il occupait une villa modeste, sans étage, au pied du camp militaire de Roux, voisin direct de l’ambassade de France sur le bord du fleuve Oubangui. La journée du 20 Novembre est aussi marquée par une grève des professeurs à Bangui qui durera jusqu’au 30 Décembre.

Des élections pour consacrer le retour à l'ordre constitutionnel.

Le 11 Décembre, Abel Goumba est poussé à la démission. Le « Monsieur Propre » de la politique centrafricaine, âgé de 77 ans, quitte son poste sans esclandre pour un poste de vice-président spécialement créé pour lui. Le lendemain, Goumba est remplacé par Célestin Leroy Gaombalet, un banquier à la retraite. M. Gaombalet a dirigé l'Union Bancaire en Afrique Centrale (UBAC) jusqu'à sa privatisation en 1981 puis la Banque de développement des États de l'Afrique centrale (BDEAC) à Brazzaville, avant de revenir à Bangui pour diriger la Banque Populaire Maroco-centrafricaine (BPMC) dans les années 1990. Il a le profil d’un gestionnaire et ne devrait ainsi pas faire d’ombre au chef de l’Etat étant plu novice sur le plan politique. François Bozizé conserve le portefeuille de la Défense nationale dans ce nouveau gouvernement. Jean-Pierre Lebouder ancien Premier Ministre sous Dacko, ancien cadre à la Banque Mondiale est nommé Ministre d'État à l'Économie et aux Finances assisté par l’économiste Daniel N'Ditiféï Boysémbé. Le principal souci du nouveau gouvernement est alors d’amener l’Union Européenne à reprendre sa coopération avec Bangui qui négocie avec Bruxelles un prêt de 70 milliards de FCFA. Si les fonctionnaires, ont reçu leurs salaires entre avril et août, ils recommencent dès les mois de novembre et décembre 2003 en particulier à accuser des arriérés. Il faut non seulement éteindre la grogne sociale mais aussi assurer l’organisation d’élections à venir censées rétablir la légalité constitutionnelle. Le 30 Décembre, la ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie effectue une visite à Bangui, promet d’apporter l’aide de la France aux scrutins annoncés si des gages suffisants de bonne gouvernance sont donnés. Le 15 janvier 2004, à la veille de la visite cruciale des bailleurs de fonds du FMI et la Banque mondiale, le gouvernement annonce qu’un comité interministériel chargé d'élaborer le projet de budget, mais aussi un calendrier pour l'organisation des élections municipales, législatives et présidentielles, prévues entre fin 2004 et le printemps 2005. Le 26 Février, les employés de l’éducation nationale commencent une grève de 8 jours pour obtenir le paiement de leurs arriérés de salaire. Le 28 février, Martin Ziguélé et André Kolingba font leur retour à Bangui. Le 30 Avril, Bozizé créée une commission électorale mixte indépendante (CEMI) en charge d’organiser les élections à venir. Juin 2004 : lors de son deuxième congrès ordinaire, le MLPC reconduit Ange Félix Patassé, alors en exil au Togo, à la tête du parti dont Luc Apollinaire Dondon Konamabaye assure son intérim. MM. Gabriel Koyambounou, actuellement détenu depuis un an à la prison de Ngaragba, en attendant son procès pour détournement de deniers publics et complicité d'atteinte à la sûreté de l'Etat, et Jacquesson Mazette, passé dans la clandestinité sont élus respectivement aux postes de deuxième et de troisième vice-présidents du parti. Un courant MLPC/CO "courant originel" emmené par Hugues Dobozendi se dégage lors de ce Congrès refusant d’entrer eu Bureau Politique du parti et prenant position contre l’investiture de Patassé à la tête du MLPC en vue des prochaines élections alors que Bozizé a clairement indiqué qu’il serait arrêté pour répondre de ses crimes s’il rentre au pays. Durant l’été, le CNT examine et amende les projets de Constitution et de Code électoral. Cependant, le 20 août, le gouvernement centrafricain signe les projets de Constitution et de Code électoral dans leurs versions initiales, bien qu'ils aient été amendés par le CNT, son avis n’étant que consultatif. Le 20 Août, François Bozizé effectue une visite officielle à Pékin. La Chine fait un don d'1,5 milliards de FCFA à la Centrafrique afin de financer différents projets et octroie un prêt sans intérêt du même montant s'étalant sur 5 ans à compter du 1er septembre 2004 et remboursable sur une période de 10 ans à partir de 2014. De son côté, la partie RCA s’engage à soutenir à l’ONU une position de soutien à la République populaire de Chine en réaffirmant qu'il n'y a qu'une seule Chine. Le 26 Août, après des voyages officiels en Chine et en France, Bozizé fait escale à N'Djamena, où il s'entretient brièvement avec Idriss Deby. Le même jour, le gouvernement centrafricain entame jeudi des discussions avec les personnels des douanes, des impôts, des finances et du trésor, au premier jour d'un mouvement de grève très suivi portant sur le paiement des primes et indemnités sur salaires suite au non-paiement des salaires d'avril, mai, juin et juillet. Le 2 septembre, M. Gaombalet annonce la composition d'un nouveau gouvernement remanié (Gaombalet II). Face aux graves problèmes économiques et financiers du pays, les syndicats et le CNT avaient proposé au chef de l'Etat la réduction de la taille du gouvernement, afin notamment de réduire le train de vie de l'Etat. Après ce remaniement, le gouvernement compte 24 ministres contre 28 dans l'équipe précédente et l'on y relève peu de changements. Ce remaniement intervient peu après la démission du ministre de l'Economie et des Finances, Jean-Pierre Lebouder, qui est remplacé par Daniel N'ditifeï-Boysembé, son ancien ministre délégué. Homme-clé du gouvernement, apprécié des bailleurs de fonds, son action devait permettre à la Centrafrique, de respirer financièrement. M. Lebouder avait été l'artisan de la signature en juillet d'un accord de facilité post-conflit avec le Fonds monétaire international (FMI) mais les divergences avec le chef de l'Etat étaient devenues, semble-t-il, trop profondes, et M. Lebouder a préféré démissionner. Le 2 septembre, le deuxième vice-président du CNT, Charles Massi, réclame une modification du projet de Constitution et du code électoral promulgué courant août dans une déclaration intitulée: « Appel au réveil national. » Selon lui, la Constitution qui sera soumise à référendum en novembre prochain « institue un pouvoir autocratique, le chef de l`Etat qui disposerait avec celle-ci de la totalité des pouvoirs, l’Assemblée nationale étant reléguée au rôle de chambre d`enregistrement. »

Le 3 septembre, sept partis politiques centrafricains réclament un réexamen par le CNT du Code électoral et du projet de Constitution dénonçant le fait que « Bozizé a volontairement décidé de ne pas tenir compte de l'essentiel des directives du Dialogue national » à propos de la future Constitution centrafricaine. Au cœur de la querelle figurent les pouvoirs accordés au futur président et, surtout, la durée de son mandat. Conformément aux dispositions consensuelles retenues par le Dialogue national, le CNT est favorable à un mandat, renouvelable une fois, de cinq ans, alors que le président et son gouvernement souhaitent le porter à six ans. Enfin dernière série de divergences, celles qui concernent les pouvoirs du futur chef de l'Etat. Bozizé veut un président fort alors que son opposition souhaite limiter ses prérogatives par un Premier ministre et un pouvoir législatifs forts. Les deux camps campent solidement sur leurs positions et aucun ne semble prêt à capituler. Le 16 Septembre, une commission nationale pour le Désarmement, Démobilisation et Réintégration est créée par Bozizé pour aider à la réinsertion des combattants qui ont pour la plupart aidé Bozizé à prendre le pouvoir.

Le 29 octobre, les opérations de recensement électoral entamées afin de pouvoir établir les listes électorales le 16 octobre prennent fin. Seuls les électeurs inscrits lors de ce recensement pourront voter lors du référendum constitutionnel, des présidentielles et législatives à venir. Le 4 novembre, la situation sécuritaire se dégrade d’abord dans l’Ouham-Pendé et une partie de l'Ouham, des combats opposant l’armée à des bandes armées puis le 21 novembre lorsque des assaillants attaquent Birao.

Le 29 novembre, le MLPC/CO "courant originel" annonce son soutien à une candidature du président centrafricain François Bozizé. Suite à la médiation de diplomates locaux, le président Bozizé retire les dispositions litigieuses du texte de constitution. Le CNT comme la présidente du comité de suivi des actes du Dialogue national (CSADN), Catherine Samba Panza, salue « les efforts particuliers d'apaisement du climat politique et social » déployés par le chef de l'Etat. Le texte définitif ressemble donc comme deux gouttes d'eau à celui sorti des bancs du Parlement de transition. A côté d'un président élu pour cinq ans, il place un vrai Premier ministre chargé de « conduire la politique de la nation » et une Assemblée nationale capable de véritablement contrôler l'exécutif. Le futur chef de l'Etat voit, lui, ne peut diriger un parti politique et définit clairement les cas de haute trahison pour lesquels il peut être poursuivi. Y figurent la violation du serment, les homicides politiques et l'affairisme.

Le 1er décembre, Bozizé appelle à voter "massivement" en faveur de la nouvelle constitution. "Cette loi fondamentale (...) traduit notre volonté d'asseoir la démocratie dans notre pays", affirme le chef de l'Etat sur les ondes de la radio nationale. Deux jours plus tôt, le premier vice-président du CNT avait délivré les mêmes consignes. Même le MLPC appelle à voter oui par la voix du premier vice-président du MLPC Luc Apollinaire Dondon Konamabaye. Le 5 décembre, se tient le referendum pour l’adoption de la nouvelle constitution.

Le 11 décembre, un Conseil politique national extraordinaire du MLPC se prononce en faveur d’une candidature de précaution de Martin Ziguélé en qualité de candidat indépendant si Patassé ne peut se présenter aux élections. Le même jour, Bozizé qui déclarait en mars 2003 « je suis venu sauver le peuple centrafricain. Ma mission s'arrête là » annonce finalement à ses partisans au stade Barthélémy Boganda sa candidature à la présidence de la République. "Après avoir mesuré le chemin parcouru et évalué ce qui reste à faire, le moment est venu de vous confier la décision que j'ai arrêtée après mûre réflexion." "En ma qualité de soldat je suis au service du peuple. Il m'appelle, je n'ai d'autre choix que d'obéir. Je me présente donc aux élections présidentielles", déclare-t-il.

Le 16 décembre, 25 partis politiques soutenant la candidature de François Bozizé à la présidentielle signent un protocole d'accord afin de présenter aux législatives des candidats indépendants inscrits sous la bannière KNK ainsi que de soutenir la candidature de Bozizé à la présidentielle de 2005.

Le 24 décembre, suite au référendum du 5 décembre, nouvelle constitution centrafricaine est adoptée avec 87,2% de « oui » selon les résultats définitifs du scrutin annoncés vendredi par le président de la Cour Constitutionnelle de Transition, Marcel Malonga Grémangou.

Le 28 décembre, la nouvelle Constitution est promulguée par François Bozizé. Des élections présidentielles et législatives doivent se tenir dans les 90 jours. A cette date, le général de brigade centrafricain Timothée Malendoma est promu "à titre exceptionnel" au grade de général de corps d'armée par Bozizé, devenant ainsi le second officier le plus gradé dans la hiérarchie militaire centrafricaine, après le général d'armée André Kolingba. Bozizé a également promu au grade de général de brigade, le colonel Raymond N'dougou, préfet de la Vakaga, dont le chef-lieu Birao avait été attaqué en novembre.

Le 30 décembre, la CCT dirigée par M. Marcel Malonga Grémangou rend publique sa décision concernant les 15 candidatures présentées pour l'élection présidentielle: seules 5 sur 15 sont recevables. Outre M. Bozizé, la CCT déclare que pourront se présenter André Kolingba, Abel Goumba, Henri Pouzère et Auguste Boukanga. La Cour invalide les candidatures de l'ex-président Patassé, de Martin Ziguélé, de Jean-Jacques Démafouth, de Jean-Paul Ngoupandé, des anciens ministres Charles Massi et Olivier Gabirault et du pasteur Josué Binoua. L'ancien maire de Bangui Joseph Bendounga, seul opposant déclaré au régime de transition instauré par François Bozizé, annonce son retrait faut d'avoir pu payer la caution de 5 millions de Fcfa exigée aux candidats. Enoch Dérant-Lakoué avait lui choisi de rester à la tête de la direction nationale de la BEAC et Fidèle Gouandjika, directeur de la Socatel, avait récemment décidé de se retirer pour favoriser la candidature de M. Bozizé. Cette décision de la cour a donné lieu à une crise politique en RCA, les partis des candidats recalés par la CCT qualifiant la décision de la cour d’illégale et demandant la dissolution de cette instance.

Le 4 janvier 2005, Bozizé décide de repêcher 3 des 7 candidats exclus de la course aux élections présidentielles : Jean-Paul Ngoupandé, Martin Ziguélé et Charles Massi.

Le 22 janvier, face à la mobilisation des partis politiques, des organisations de la société civile, la médiation du président gabonais Omar Bongo aboutit à la signature de l’accord de Libreville. Cet accord consacre la participation de toutes les personnalités dont le dossier de candidature avait été invalidé en décembre 2004 par la CCT sauf celle de Patassé, candidat du MLPC.

Le 26 janvier, le MLPC déclare dans un communiqué "prendre acte de la décision de Libreville, qui a entériné l'invalidation de la candidature de M. Ange-Félix Patassé, bien que non fondée juridiquement" et annonce qu'il soutiendra Martin Ziguélé, jusque-là candidat indépendant, pour le scrutin présidentiel du mois de mars. Mais l’ancien président Patassé revendique toujours le droit à se présenter aux élections. "L’Accord de Libreville n’a aucun fondement juridique", déclare par la suite Patassé sur les ondes de la radio Ndeke-Luka.  "Je n’ai pas été consulté et je n’ai pas envoyé de représentant". En réaction, il demande aux militants du parti "de se lever et se mobiliser pour faire échec aux agissements de tous les traîtres dissimulés au sein de la direction du parti et barrer la route à la dictature militaro-fasciste de Bozizé". 11 candidats sont désormais en course pour les élections présidentielles : M. Bozizé, M. Kolingba, M. Goumba, M. Pouzère, M. Boukanga, M. Binoua, M. Gabirault, M. Ngoupandé, M. Massi, M. Pouzère et M. Démafouth.

Le 13 mars, se tient le premier tour des élections présidentielle et législatives censées marquer la fin de la transition mise en place depuis la prise de pouvoir du général Bozizé. La proclamation des résultats voit François Bozizé recueillir 42,97% des suffrages, devant Martin Ziguélé qui récolte lui 23,53% des voix. Arrivé en troisième position, André Kolingba refuse de reconnaître les résultats du premier tour, affirmant qui il a eu des irrégularités. Avec 16,36% des voix, il se présente comme l'arbitre potentiel du second tour. Arrivent ensuite dans l’ordre Ngoupandé: 5,08%, Massi: 3,22%, Goumba: 2,51%, Pouzère: 2,10%, Binoua: 1,52%, Demafouth: 1,27%, Boukanga: 0,80% et Gabirault: 0,66%. Durant l’entre-deux-tours, Jean Paul Ngoupandé et Charles Massi concluent un Accord Politique avec Bozizé pour le second tour pour le compte de la Convergence Kwa na Kwa. L’ancien président Kolingba n’a lui pas pu se résoudre à lui donner officiellement son appui choisissant de ne pas donner de consignes de vote. Le 8 Mai, se tient le deuxième tour des élections présidentielles. Finalement, Bozizé est déclaré vainqueur du second tour des élections par la CCT avec 64,6% des voix contre 35,45% des voix pour Ziguélé. A l’Assemblée, le KNK remporte 42 sièges, le MLPC 12 sièges, et le RDC en remporte 8, le reste étant majoritairement des députés indépendants.

Le 10 juin, les nouveaux députés de l’Assemblée nationale se réunissent pour la première fois en session extraordinaire et élisent Célestin Leroy Gaombalet à la présidence de l’Assemblée avec 78 voix contre 18 en faveur de son opposant, Luc-Apollinaire Dondon Konamabaye. Entre-temps, la CCT a rejeté la requête de Martin Ziguélé, qui par des recours en annulation pour irrégularités souhaitait invalider l’élection. Le 11 juin a lieu la cérémonie d’investiture du Président Bozizé, en présence de Denis Sassou Nguesso, Omar Bongo Ondimba, Joseph Kabila, Idriss Deby, la Ministre de la Coopération de la France Brigitte Girardin ainsi que des représentants du Cameroun, du Maroc, du Soudan, du Mali ou encore du Sénégal. M. Ziguélé, qui a reconnu sa défaite assiste, parmi d'autres personnalités centrafricaines, à cette cérémonie qui se déroulée au Palais de l'Assemblée nationale à Bangui.

Le 13 Juin, le président centrafricain François Bozizé nomme Elie Doté, jusqu'alors fonctionnaire de la Banque africaine de développement (BAD) basé à Tunis au poste de Premier ministre.