Maitre Joseph Gnou critique la décision du conseil d'Etat dans l'affaire Bedounga

0Par la récente décision du Conseil d’État, il a été opposé à M. Bedounga, qui a attaqué ce décret de nomination de certains leaders des groupes armés en qualité de ministre dans l’actuel gouvernement, l’incompétence du Conseil d’Etat au motif que le décret attaqué aurait un caractère politique. C’est cette décision que je critique ici. Selon moi, l’arrêt du Conseil d’Etat en l’espèce n’est pas pertinente et fait régresser le droit administratif et le rôle du juge administratif.                    Me Joseph Gnou@JGfck

Je rappelle ici que toutes mesures prises par l’exécutif, qu’elles soient le fait du président de la République ou du gouvernement, voire des collectivités territoriales, sont des actes politiques et qu’ils sont des moyens ou des actes de l’Etat permettant aux individus ou à des entités publiques ou privées de participer, par des charges confiées, à la vie de la société. En conséquence de ce qui précède, un décret qu’il soit ordinaire ou pris en Conseil des ministres ou encore en Conseil d’Etat, au-delà de son attribut politique, est un acte administratif susceptible d’être attaqué devant le Conseil d’Etat.                                

Le Conseil d’Etat, juge administratif du second degré, par ailleurs conseiller du pouvoir exécutif, est le contrôleur des actes de l’administration -actes unilatéraux ou contractuels-. C’est uniquement sous cet aspect d’acte administratif que s’exerce le contrôle juridictionnel du juge administratif. C’est dans ce cadre et uniquement dans ce cadre que le Conseil d’Etat aurait pu se placer pour apprécier la requête de monsieur Bedounga.

Par ce contrôle juridictionnel, le Conseil d’Etat utilise les moyens ou pouvoirs qui lui sont attribués par notre droit positif, pour assurer la paix sociale, la démocratie et la sécurité juridique dans le rapport de l’Etat et des particuliers. C’est là une façon d’adoucir la puissance étatique par le respect de la protection des droits subjectifs -Les droits des particuliers-. Or, dans cette affaire, on constate bien que le Conseil d’Etat s’est éloigné de cette préoccupation de protection des droits des particuliers face à l’Etat. Cette protection se traduit par l’assurance de la tranquillité juridique et la sécurité juridique des justiciables.

Il est alors incontestable que l’arrêt entrepris par le Conseil d’Etat s’éloigne du respect de la règle d’intérêt général et marque ainsi une régression du droit administratif et du rôle du juge administratif. Le juge doit désormais affirmer son autorité face à l’Etat, d’autant que cette autorité tire sa légitimité dans notre droit positif caractérisé par une procédure organisée d’une part, par la constitution d’autre part .
 

Me Joseph Gnou

Maitre Joseph Gnou propose à ceux qui sont intéressés par le sujet les lectures suivantes :

  • Le Doyen Georges Vedel ‘’ Etudes et Documents du Conseil d’Etat ‘’ 1954
  • Professeur Michel Framont - Paris I - Le Droit administratif des Etats européens, PUF 2006

 

Le 5 décembre 2017