France : conférence internationale sur la Libye

Conférence de presse d'Emmanuel Macron, président de la République française

suite à la conférence internationale sur la Libye

 

Mesdames et Messieurs,

Merci d’être là et après la lecture de la déclaration à laquelle nous venons d’assister et son approbation par tous, nous souhaitions tenir une conférence de presse. Je souhaitais commencer cette conférence de presse en exprimant la solidarité du peuple français à l’égard du peuple belge. Nous avons pendant notre réunion appris ce qui s’était passé ce matin en Belgique et la terrible attaque qui semble-t-il serait qualifiée de terroriste maintenant par le parquet. Il est tôt pour s’exprimer mais je voulais ici adresser toutes les condoléances et la solidarité du peuple français à l’égard de nos voisins belges.

Aujourd’hui s’est donc tenue une conférence importante qui est le fruit d’un travail de longue haleine, qu’à la fois le président Sarraj, l’ensemble des parties prenantes libyennes, la communauté internationale et particulièrement le représentant des Nations Unies, Ghassan Salame mènent depuis des mois et des mois. En juillet 2017, nous avions tenu à La Celle-Saint-Cloud une première réunion où le président Sarraj était présent avec le maréchal Haftar en présence du représentant Salame qui commençait sa mission et qui avait permis de dégager des premières lignes de force. Un travail très important ensuite a été conduit sur le terrain qui a jalonné les mois précédents, en septembre le représentant Ghassan Salame avait exposé ainsi après un été passé au travail avec l’ensemble des parties prenantes ses propositions et sa feuille de route qui avait été validées aux Nations Unies en marge de l’Assemblée générale et un très gros travail a été fait ces derniers mois.

La rencontre qui s’est tenue aujourd’hui est une rencontre historique parce qu’elle s’inscrit dans ce processus et qu’elle a été préparée de longue haleine par l’ensemble des parties prenantes et parce qu’elle a été accompagnée par l’ensemble de la communauté internationale qui a à connaître de cette situation. Nous avons tous partagé le même sentiment de responsabilité, d’urgence et d’engagement sur la nécessité d’aboutir rapidement à une solution politique en Libye. C’est la première fois que sous cette forme une telle réunion s’est tenue avec l’ensemble des responsables libyens, étape clé pour la réconciliation en Libye. Monsieur Fayez al-Sarraj, président du Conseil présidentiel, monsieur Aguila Saleh président de la Chambre des représentants, monsieur Khaled al-MishriI, président du Haut Conseil d’Etat, et monsieur Khalifa Haftar, commandant général de l’Armée nationale libyenne, en présence de plusieurs délégations libyennes représentatives de composantes de la société libyenne.

C’est la première fois que sous ce format-là l’ensemble de ses dirigeants dont certains ne se reconnaissent pas mutuellement se sont réunis, ont accepté de travailler ensemble et ont ensemble, vous l’avez vu, approuvé une déclaration commune. C’est une étape essentielle, importante et qui rend possible ce qui maintenant va venir. C’est aussi la première fois qu’en leur présence nous avons rassemblé l’ensemble des membres de la communauté internationale sous l’ombrelle des Nations Unies qui ont à connaître de la situation libyenne, pays voisins, pays africains, pays Proche et Moyen-Orient, pays européens, organisations régionales, membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies.

L’ensemble des pays qui parfois, il faut bien le dire, ces dernières années ont essayé de tirer les ficelles de la situation libyenne derrière les rideaux en jouant l’un contre l’autre, en se nourrissant des divisions, parfois des déstabilisations, ont accepté de travailler ensemble pour marquer aussi leur accord et soutenir ce travail conduit par les Libyens pour s’engager autour de cette feuille de route commune et de cette déclaration, c’est là aussi la première fois et c’est une avancée indispensable. Je veux saluer la qualité du travail qui a pu se faire avec l’ensemble d’entre eux et très bonnes relations que nous avons nouées et construites ces dernières semaines pour œuvrer en ce sens.

Ce travail est indispensable pour la Libye au premier chef, le peuple libyen aspire à la sécurité, à la stabilité, à vivre mieux et à pouvoir exprimer sa souveraineté. C’est ce que nous lui devons parce que parfois nous avons pu décider de nous substituer à sa souveraineté et ce faisant je crois que nous reconnaissons l’importance du peuple libyen, la dette que nous avons à son endroit et le travail que nous lui devons pour arriver à ce résultat.

Ensuite, ce sujet est important pour toute la région et la mobilisation de l’Union africaine, de la Ligue arabe en particulier et de tous les Etats voisins et de nombreux Etats africains l’a montré, aujourd’hui la situation en Libye est un problème de sécurité, de stabilité qui la dépasse et qui touche la plupart de ces pays avec des conséquences graves sur les pays voisins, sur tout le Sahel et une déstabilisation potentielle en Afrique mais aussi au Proche et Moyen-Orient. Et donc l’engagement de tous derrière une solution souveraine, inclusive en Libye est le témoignage de cette importance pour la sécurité collective et la stabilité de la région. Et puis cela nous touche aussi parce que nombre d’Etats européens ont eu à connaître des conséquences de la crise en Libye. Je pense à l’Italie qui a vécu ces derniers mois et ces dernières années une importante crise migratoire avec laquelle nous avons travaillé de manière exemplaire et je veux ici saluer l’engagement de l’Italie dans le travail qui a été fait mais elle a eu à connaître des conséquences directes de cette crise. Et tous les pays européens et la Haute représentante de l’Union européenne était également présente avec nous ont marqué leur engagement pour trouver une solution commune.

Les discussions qui se sont déroulées ce matin ont donc montré une volonté de s’engager sur des points précis. D’abord, un consensus sur la nécessité d’unifier les institutions gouvernementales, économiques et de sécurité à terme pour contribuer à l’affirmation pleine et entière de l’Etat libyen en mettant notamment fin à toutes formes d’institutions parallèles avec un processus progressif qui se fera et trouvera son plein aboutissement à l’issue du processus électoral mais surtout avec la décision, et nous l’avons conclue ce matin même, de nous donner un calendrier et une procédure. Et donc d’ici au 16 septembre, date importante pour le peuple libyen, soit d‘avoir acté un changement constitutionnel, soit sur la base de la déclaration constitutionnelle existante de pouvoir prendre le texte de loi électoral qui permettra d’organiser les élections. Et donc d’ici au 16 septembre il y a eu un engagement commun pour prendre les dispositions qui permettront d’organiser de manière satisfaisante un processus électoral, soit avec une nouvelle constitution, soit sur la base d’une loi électorale qui aura été dûment votée, les trois présidents et le maréchal Haftar se sont engagés sur cela, ce qui est essentiel parce qu’ils sont les acteurs qui rendront possible ce processus là où depuis des mois nous étions bloqués par les non-reconnaissances mutuelles et la capacité de l’un ou de l’autre à interrompre le processus.

Deuxième élément, c’est l’organisation pour le 10 décembre 2018 d’élections présidentielles et législatives et donc l’engagement sur la base de ce processus de redonner pleinement, sûrement au peuple libyen sa souveraineté et de lui permettre de l’exprimer à cette date. C’est un élément inédit mais je crois qu’il est à la hauteur aussi des attentes du peuple libyen lui-même. Le représentant spécial Salame a fait plusieurs sondages qui ont montré la volonté des libyens de s’engager dans ce processus, de pouvoir exprimer leur voix et de décider le plus vite possible. Ce texte va donc dans ce sens et vous sera présenté dans ses détails par monsieur Salame dans quelques instants après que la lecture en a été faite devant nous il y a quelques instants à peine.

Avant de céder la parole à monsieur Salame et le président Saraj je veux dire ici vraiment que la présence d’une vingtaine de pays, organisations régionales aux côtés des Nations-Unies et des libyens aujourd’hui témoigne de cette unité de la communauté internationale et du fait que nous avons un engagement unique derrière lequel nous allons œuvrer. Nous nous sommes tous engagés collectivement à soutenir les efforts, à respecter les engagements collectifs, c’est une étape à cet égard essentielle. Je veux ici remercier le travail remarquable qui a été fait depuis plusieurs mois par Ghassan Salame, le représentant spécial de l’Organisation des Nations Unies. Je veux, Monsieur le président Sarraj, vous remercier aussi car dès le début vous avez pris vos responsabilités et accepté ce dialogue inclusif et rendu possible la réunion et le travail que nous avons conduits ensemble aujourd’hui. Maintenant nous avons des engagements clairs et précis, un calendrier, il a été formellement et officiellement approuvé par les parties prenantes, il a été soutenu par la communauté internationale, nous n’avons plus qu’à agir avec un seul objectif, l’intérêt du peuple libyen.

Le 29 mai 2018