USA : discours du président de la République du Centrafrique à la 73e assemblée générale des Nations Unies

  • Madame la présidente de la 73e Session ordinaire de l’assemblée générale des Nations-Unies,
  • Excellences, Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
  • Monsieur le Secrétaire général de l’organisation des Nations-Unies,
  • Distingués délégués,
  • Mesdames et Messieurs.

 

Je voudrais tout d’abord adresser mes chaleureuses félicitations à la République de l’Équateur, particulièrement à vous, Madame la Présidente pour votre brillante élection à la présidence de la 73e session de l’assemblée générale des Nations-Unies et vous assurer du plein soutien de mon pays pour l’accomplissement de votre noble et exaltante mission.

Par la même occasion, je tiens à saluer les qualités de travail abattu ainsi que les remarquables résultats obtenus par Monsieur Miroslav Lajcák au cours la 72e Session écoulée, qui ont énormément contribué au renforcement de la coopération entre nos Etats. Aussi, voudrais-je réitérer à l’endroit de Monsieur Antonio Gutteres, secrétaire général des Nations-Unies, la confiance placée en lui, à la tête de notre Organisation et surtout pour les appuis constants et multiformes, en faveur de mon pays la République centrafricaine.

Madame la présidente,

Le thème de cette 73e Session, je cite : "Faire en sorte que les Nations-Unies soient pertinentes pour tous : un partenariat mondial et des responsabilités partagées pour des sociétés pacifiques, équitables et durables", met un accent particulier sur le rôle central que notre Organisation commune devrait jouer en ce 21e siècle.

Ce qui exige des réformes profondes au sein de notre Institution, afin de mieux l’adapter aux nouveaux défis qui affectent nos différentes sociétés aujourd’hui que sont le terrorisme, l’extrémisme violent, le changement climatique, le phénomène migratoire et la pauvreté.

Du haut de cette tribune, je voudrais passer en revue le chemin parcouru par notre organisation depuis plus de 70 ans, dégager les acquis, relever les faiblesses, mais surtout envisager l’avenir.Aujourd’hui, le succès du multilatéralisme ne peut être remis en cause, car grâce à l’action commune des Etats membres, de grandes avancées ont été enregistrées dans plusieurs domaines au sein de la société mondiale. C’est dire que les Nations-Unies demeurent le cadre légitime par excellence, où sont traitées les grandes questions internationales.

C’est pour cette raison que mon pays, la République centrafricaine continuera de soutenir le rôle central des Nations Unies dans la préservation et le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde.

Madame la présidente,

Les inégalités économiques et sociales persistantes dans le monde, l’écart croissant du niveau de développement entre les Etats, la sous-représentation de l’Afrique au Conseil de Sécurité et dans les autres organismes du système des Nations-Unies, la question des Droits de l’Homme, constituent autant des problématiques auxquelles nous devons ensemble trouver des solutions. Ces imperfections peuvent être corrigées si nous nous y engageons.

Le leadership mondial incarné par les Nations Unies, doit être renforcé et doté des outils nécessaires afin de répondre efficacement aux défis de l’heure, tout en assurant une meilleure répartition des tâches entre les Etats membres. En effet, depuis plusieurs années, l’Afrique n’a cessé de dénoncer l’inégalité historique qui continue à priver le continent de siéger au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU, en tant que membre permanent, jouissant du droit de veto et soutenir l’élargissement des sièges de membres élus par l’Assemblée Générale pour une participation plus juste, plus équilibrée et plus représentative, au Conseil de Sécurité afin de pouvoir assurer pleinement son rôle dans la promotion de la paix dans le monde.

La République centrafricaine mon pays, soutient la position de l’Union africaine, qui veut que l’Afrique soit pleinement représentée dans tous les organes de l’ONU et surtout du Conseil de Sécurité qui est le principal organe de prise de décision de notre organisation commune, pour les questions liées à la paix et à la sécurité internationale.

Madame la présidente,

La question du terrorisme et de l’extrémisme violent demeure aujourd’hui un défi sécuritaire auquel notre planète reste confrontée et constitue une grande préoccupation. Elle compromet la sécurité de nos populations exposées à une violence aveugle, engendre une succession de crises humanitaires et entrave voire annihile tout effort de développement.

Les nombreuses initiatives prises sur le continent africain ces dernières années, pour faire face à ces phénomènes, sont l’expression d’une forte volonté politique et une grande détermination à dépasser les cloisonnements régionaux, dès lors qu’ils font obstacle à la prise en charge effective des défis sécuritaires communs.

Qu’elles soient prises au niveau régional ou continental, ces initiatives ont, toutes permis de poser les jalons d’une approche cohérente et d’une doctrine mondiale face à ces menaces asymétriques maintenant dominantes. Elles ont en outre, démontré notre ferme volonté de trouver des réponses spécifiques adaptées à notre environnement, dans le cadre de l’architecture mondiale de paix et de sécurité.

La prévention et la lutte contre ces fléaux, implique nécessairement l’examen des voies de coopération visant à proposer une approche holistique en renforcement des synergies entre les différents acteurs, à l’effet de mettre nos peuples à l’abri de ces menaces et de leurs conséquences dévastatrices.

Madame la présidente,

Le phénomène de la migration n’a cessé de s’aggraver dans le monde ces dernières années, au point de constituer une des questions prioritaires sur le plan international.

La migration bien gérée peut avoir un impact positif substantiel sur le développement des pays d’origine et avoir des avantages significatifs pour les pays de destination. Par contre mal gérée ou non gérée, elle peut avoir aussi de graves conséquences pour le bien-être des pays et des migrants et entrainer un effet déstabilisant sur la sécurité nationale et régionale. C’est pourquoi, mon pays salue la tenue prochaine à Marrakech au Maroc au mois de décembre, de la conférence intergouvernementale sur le pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières et espère que ce forum débouchera sur des propositions constructives.

Madame la présidente,

Sur le changement climatique et le développement durable, notre planète continue toujours de subir les conséquences des phénomènes naturels comme les séismes, les précipitations, la sècheresse, l’avancée fulgurante du désert et le réchauffement climatique de la planète, qui constituent autant de préoccupations.

A cet effet, voudrais-je ici rappeler, à nous tous, Etats signataires de l’Accord de Paris sur le changement climatique, de mutualiser nos efforts afin de préserver notre environnement commun, car cela va de l’avenir de notre planète.

D’autres enjeux se posent encore à nous entre autres, le respect des droits humains, l’Etat de droit et la bonne gouvernance qui sont les conditions incontournables du bien-être social.

Distinguées personnalités,
Mesdames et Messieurs.

Je voudrais aussi saisir cette occasion qui m’est offerte, pour évoquer avec vous la situation dans mon pays la République centrafricaine. Mais avant toute chose, je voudrais m’incliner respectueusement devant la mémoire de tous ceux qui sont tombés dans l’exercice de leur périlleuse et noble mission de paix en République centrafricaine et exprimer par la même occasion toute la gratitude du peuple centrafricain à l’ensemble de la Communauté internationale ici représentée, pour tous les efforts consentis afin de ramener la paix dans mon pays.

En effet, depuis deux ans et demi, mon gouvernement œuvre sans relâche pour renouer avec les valeurs cardinales qui fondent la démocratie, la liberté et les droits de l’homme afin de créer un environnement de confiance et de sérénité, au sein du peuple centrafricain tout entier, lui permettant ainsi de contribuer au redressement et à la reconstruction de son pays. En dépit de ces efforts de paix et de concorde nationale appuyés par la communauté internationale à travers la MINUSCA, la République centrafricaine continue de vivre des évènements tragiques et douloureux perpétrés par les ennemis de la paix qui n’ont d’autres intérêts que celui de le déstabiliser pour leur intérêt égoïste.

La situation sécuritaire a été marquée depuis le début de l’année 2018, par une recrudescence des affrontements armés, caractérisés par des vagues de violence successives qui ont touché aussi bien la capitale que l’intérieur du pays. Cette violence alimentée par la concurrence entre les différents groupes armés pour l’accès aux ressources naturelles du pays, contribue à un climat de tensions et divise les communautés sur des bases ethnique et sectaire.

Le nombre de violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire a augmenté, notamment avec des attaques perpétrées contre la population civile, le personnel humanitaire, les casques bleus, les lieux de culte et les centres de soin. Toutefois, je puis vous rassurer de notre ferme volonté de n’épargner aucun effort pour mettre hors d’état de nuire ces forces du mal et créer les conditions de la reconstruction de notre pays afin de redonner aux centrafricains la joie et le goût du vivre ensemble.

Mon gouvernement avec le soutien de la MINUSCA, continue de faire des progrès en ce qui concerne l’extension de l’autorité de l’État sur le territoire national, notamment à travers le déploiement progressif de l’administration et des services de l’Etat dans nos provinces ainsi que le rétablissement des services sociaux de base.

Par ailleurs, le gouvernement a réalisé des avancées significatives au niveau des réformes dans les secteurs de la sécurité et de la défense, lesquelles faciliteront le déploiement progressif des forces de défense et de sécurité intérieure centrafricaines ainsi que la mise en œuvre du programme national de DDRR.

Acet effet, je me réjouis de l’engagement pris par l’Union européenne ainsi que nos partenaires bilatéraux pour soutenir la formation et la montée en puissance de nos forces de défense et de sécurité d’une part et, accompagner la mise en œuvre du plan national de la défense et le déploiement des FACA, dans la perspective d’une armée de garnison et de l’administration sur l’étendue du territoire national d’autre part.

Je salue également l’appui matériel apporté par les Etats-Unis d’Amérique, la République populaire de Chine la fédération de Russie et la France aux forces armées centrafricaines dans la même vision. Qu’il me soit donc permis de réitérer, du haut de cette tribune, notre appel pour la levée totale de l’embargo sur les armes qui pèse encore sur notre armée nationale afin de lui permettre d’être véritablement opérationnelle et contribuer aux côtés de la MINUSCA au retour définitif de la paix.

Madame la présidente,

La reconstruction de la République centrafricaine ne peut se faire sans un cadre bien défini et cohérent. C’est pourquoi la mise en œuvre du Plan National de Relèvement et de Consolidation de la Paix pour la République centrafricaine -RCPCA-, a enregistré des progrès avec le lancement par le gouvernement et ses partenaires internationaux de 21 projets relatifs aux services sociaux de base. Malgré ces instants obscurs qui ressurgissent souvent ou de temps en temps, et qui suscitent des interrogations, le peuple Centrafricain dans son ensemble reste confiant en l’avenir de son pays.

Alors que les défis de justice et de lutte contre l’impunité restent majeurs, la Cour Pénale Spéciale est désormais prête à entamer des enquêtes. La Cour d’Assise a tenu deux sessions cette année afin de juger des crimes de droit commun et le gouvernement a établi le cadre pour une Commission Vérité, Justice, Réparation et Réconciliation.

Dans ce contexte et, un an après son opérationnalisation en septembre 2017, le Panel de Facilitation de l’Initiative africaine a conclu deux tournées de consultations et une réunion avec les groupes armés afin de recueillir leurs revendications dans la perspective de la tenue du dialogue inclusif.

A ce titre, le gouvernement se réjouit, de l’engagement de plusieurs partenaires à soutenir cette Initiative dans la recherche de résolution de la crise, que j’ose croire, connaitra un succès et permettra enfin à la République centrafricaine de tourner définitivement cette page sombre de son histoire.

Madame la présidente,

Aujourd’hui, la République centrafricaine est résolument engagée sur la voie de la consolidation de son processus démocratique et de son relèvement économique. Le gouvernement et le peuple centrafricains, se réjouissent du retour progressif de la paix, de la sécurité et de la relance économique avec le concours de tous les partenaires engagés à ses côtés. Certes, plusieurs efforts ont été consentis et des avancées notables ont été enregistrées. Cependant, beaucoup reste à faire. C’est pourquoi je compte sur l’appui et le soutien de la l’ensemble de la communauté internationale et des amis de la République centrafricaine pour l’aider à amorcer le chemin de son développement.

Madame la présidente,

Pour conclure, je fonde l’espoir que la communauté internationale restera mobilisée aux côtés du peuple centrafricain et travaillera en synergie avec le gouvernement pour le relèvement de mon pays. Plein succès à nos travaux. Je vous remercie.

Faustin-Archange Touadera

Le 27 septembre 2018