Assemblée nationale : Intervention de Karim Meckassoua à l'occasion de la visite du secrétaire général adjoint de l'ONU

Parfait et le sga

Parfait Onega MINUSCA et le secrétaire général adjoint de l'ONU @pan

Monsieur le Vice-Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies ;

Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement ;

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, Chefs de mission diplomatique et Représentants des Organisations internationales ;

Honorables Députés, chers collègues ;

Distingués invités ; Mesdames, Messieurs ;

14708184 584211528444670 2763723947772649588 n

Karim Meckassoua, président de l'Assemblée nationale @pan


Les élus du peuple et moi-même sommes particulièrement honorés de recevoir Monsieur le Vice-Secrétaire Général de l’ONU dans cet hémicycle. Votre présence est bien la preuve que la communauté internationale reste parfaitement mobilisée sur le sort de la République centrafricaine.

À cette occasion, je vous adresse mes chaleureuses salutations et vous souhaite une cordiale bienvenue.

Monsieur le Vice-Secrétaire Général ;
Distingués invités ; Mesdames, Messieurs ;

Il y a très exactement trois ans et six jours, le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies, Son Excellence Monsieur Ban Ki Moon était ici à Bangui, dans ce même hémicycle de l’Assemblée nationale, à cette même tribune.

À cette occasion mémorable, devant le Conseil national de transition faisant office de parlement, il avait tenu à rassurer le peuple centrafricain et à nous assurer que le monde ne nous oublierait pas dans le drame que nous vivions. Il avait alors déclaré en substance, je cite : "La communauté internationale a fait défaut aux Rwandais il y a 20 ans. Et nous risquons de ne pas en faire assez pour les centrafricains aujourd’hui. Des crimes atroces sont commis ici"

Cette juste perception étayée par une analyse perspicace du drame centrafricain a sans nul doute conduit l’Organisation des Nations Unies à décider du déploiement rapide de forces en République centrafricaine.

En effet, c’est tout juste cinq jours après cette visite que le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies, dans sa résolution 2149 du 10 avril 2014, a créé la Mission Intégrée Multidimensionnelle de Stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA). Et en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, ce même Conseil de Sécurité a autorisé la MINUSCA à recourir à tous les moyens nécessaires pour accomplir son mandat, dans la limite de ses capacités et dans ses zones de déploiement.

Cette mobilisation particulièrement rapide d’abord de nos frères africains de la CEMAC, de la CEEAC, de l’UA et ensuite de la communauté internationale a permis de stopper net les crimes ethnico-religieux qui auraient pu déboucher sur un génocide.

Lorsque j’écoute les uns et les autres ; lorsque j’entends les arguments des uns et des autres, lorsque j’évalue les prises de position des uns et des autres, je me pose une seule question, que je vous pose à présent Mesdames et Messieurs : Que serait devenue aujourd’hui la République centrafricaine s’il n’y avait pas la MINUSCA ? Que va devenir la République centrafricaine si la MINUSCA partait aujourd’hui comme d’aucuns le demandent?

Je me souviendrai toujours de ce dimanche 13 décembre 2015 lorsque les ennemis de la paix ont tiré à l’arme lourde et à la grenade sur les éléments de la MINUSCA et sur la population civile, à l’école Gbaya-Dombia puis à l’école Koudoukou au PK 5, dans le but de tuer et d’empêcher la tenue du référendum constitutionnel. La riposte vigoureuse de la MINUSCA avait permis de mettre hors d’état de nuire les fauteurs et le vote a pu ainsi se dérouler normalement comme prévu.

Je saisis cette occasion solennelle pour rendre un vibrant hommage, au nom de la Représentation nationale, à la MINUSCA et à tous ces soldats de la paix qui ont quitté leur famille et leur pays pour nous venir en aide.

Nous nous inclinons tout particulièrement, sur la mémoire de ceux qui sont tombés pour que règne la paix civile en Centrafrique. Je rappelle qu'ils étaient 60.

Nous exprimons à la MINUSCA notre profonde reconnaissance.
La nation centrafricaine ne vous en remerciera jamais assez.

Monsieur le Vice-Secrétaire général;

Vous êtes ici devant les représentants d’un peuple meurtri et en perpétuel deuil qui, à force de subir des exactions de toutes sortes, à force d’enterrer ses morts jours après jour, ne peut s’empêcher de douter.

Vous êtes devant une Assemblée nationale dont le devoir est de se faire l’écho des préoccupations de nos compatriotes.

J’admets volontiers que l’émotion n’est pas absente de la réaction des Centrafricains par rapport aux actions de la Communauté internationale dans cette crise. Mais comment ne pas le comprendre ? Lorsque, comme récemment dans nos villes de Ndomété, Kaga-Bandoro, Kouango, Koui, Bocaranga, Bangui, Bambari, Grimari, Sibut, et bien d’autres, les populations sont la cible d’attaques répétées que les forces internationales, pourtant présentes à proximité, ne parviennent à enrayer.

N’est-il pas de notre devoir d’institutions publiques au service de la population de prendre cela en compte, tout en restant le plus objectif possible?

Rester objectif, c’est, Monsieur le Vice-Secrétaire général, l’exigence que l’Assemblée nationale s’est fixée pour cet échange. Il s’agit pour nous de recueillir des informations, et de permettre de lever les doutes, les équivoques et les incompréhensions, pour créer les conditions d’une coopération efficace entre la MINUSCA et les autorités, dans l’intérêt de la population.

Oui, l’enjeu pour la Représentation nationale est que la mission de la MINUSCA se poursuive en étant efficace et bien comprise.

Pour arriver à cela, permettez, M. le Vice-Secrétaire général, que nous nous fassions l’écho des interrogations de nos concitoyens concernant le mandat de la MINUSCA.

Pour rappel, ce mandat était initialement le suivant, d’après la Résolution 2127(2013) du Conseil de sécurité du 2 décembre 2013 : "Protéger les civils et rétablir la sécurité et l’ordre public, en ayant recours aux mesures appropriées, stabiliser le pays et restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire".

Et il est formulé en ces termes par la Résolution 2149 (2014) du Conseil de sécurité, en date du 10 avril 2014 : "Protéger la population civile du risque d’atteinte à l’intégrité physique, notamment grâce à des patrouilles actives".

Au regard des réalités centrafricaines, les questions que suscite ce mandat sont les suivantes :

Existe-t-il, dans un contexte comme le nôtre, un autre moyen efficace de protéger la population du risque d’atteinte à l’intégrité physique que de neutraliser ceux qui commettent ou planifient de commettre de telles atteintes ?

Peut-on parvenir à cette neutralisation sans désarmer, sans réprimer fermement les agissements criminels, et sans démanteler les filières de commerce illicite d’armes ?

Le fait que les résolutions précitées soient placées sous le chapitre VII de la Charte des Nations Unies n’implique-t-il pas nécessairement le recours à la force contre les éléments en armes qui n’obtempèrent pas, bref le désarmement forcé lorsque cela est nécessaire ?

Et enfin, comment reconstituer notre capacité de défense et de sécurité, seule solution à terme, nous disait le Ministre français de la défense avant hier, pour sécuriser durablement notre territoire et nos populations, si nos forces nationales sont maintenues sous embargo ?

Voilà, M. le Vice- Secrétaire général, les questions que se posent les centrafricains et que notre Représentation nationale vous pose.

Le 2 novembre 2016