Discours d'ouverture du Président Karim Meckassoua à l'occasion de la 2e session ordinaire

Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement ;
Madame et Messieurs les Présidents des Institutions de la République ;
Mesdames et Messieurs les Membres du Gouvernement ;
Mesdames et Messieurs les Chefs des Missions Diplomatiques, Consulaires et les Représentants des Organisations Internationales Honorables Députés, Chers Collègues ;
Distingués Invités ;
Mesdames et Messieurs.

Karim

Karim Meckassoua président de l'Assemblée nationale @pan

La nouvelle Assemblée nationale élue de la République centrafricaine ouvre sa toute première session ordinaire.

J’éprouve en cette solennelle occasion un plaisir tout particulier à vous accueillir dans la Maison du Peuple et à vous y souhaiter la bienvenue.

Faisant partie de ce peuple, vous êtes dans votre maison. Quant à vous, amis de ce peuple, recevez toute la chaleur de notre hospitalité africaine, et soyez assurés de la retrouver à chaque fois que vous viendrez, comme nous le souhaitons, nous rendre visite pour œuvrer ensemble au relèvement de notre beau, mais si éprouvé pays.

Honorables Députés, très chers Collègues ;
Distingués Invités ;
Mesdames et Messieurs ;

J’ai dit à l’instant que nous ouvrons la première session ordinaire de notre Assemblée nationale. Cela ne signifie pas que la Représentation nationale soit restée inactive depuis son installation le 3 mai 2016.

En effet, trois autres sessions extraordinaires se sont entretemps tenues, des auditions de membres du gouvernement ont eu lieu, ainsi que des participations à des réunions internationales, dont la réunion de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie à Tananarive du 8 au 12 juillet, la Conférence annuelle des Présidents des Assemblées et Sénats d’Afrique qui s’est tenue, du 3 au 9 août 2016, en Afrique du Sud et, enfin, la visite de travail en Angola du 6 au 10 septembre, tout ceci afin de réinsérer notre pays dans le concert des Nations à la digne place qui lui revient. A cela il convient d’ajouter une série soutenue de contacts avec des autorités tant nationales qu’internationales, mais aussi, je tiens à le souligner, le travail assidu qu’entreprend tous les jours tout le personnel de l’Assemblée, à un rythme proche de la cadence infernale, sur tous les dossiers, et ils sont nombreux, de rénovation de notre Parlement.

Première session ordinaire donc d’une Assemblée nationale déjà au travail, et bien au travail. Mieux encore, première session ordinaire d’une Assemblée dont les valeurs, les orientations et les principes d’action sont dorénavant fermement établis, à la faveur des sessions extraordinaires que j’ai mentionnées précédemment.

Quels sont ces valeurs, ces orientations et ces principes d’action ?

D’abord, et avant tout, que le peuple doit être au centre de toute action de l’Etat ; qu’il doit l’être en tant que finalité de l’action publique, mais aussi en tant que celui dont la volonté doit guider l’action de tous, des autorités aux citoyens eux-mêmes. Tel est le sens de l’attachement que la Représentation nationale a manifesté, dès la session consacrée à la Déclaration de politique générale du 7 au 21 juin 2016, au respect scrupuleux de notre Loi fondamentale, la Constitution. Soyez-en assurés, cet attachement sera constant au cours de la présente mandature.

Autre exigence : la sécurité du peuple centrafricain doit être l’objectif premier de nos efforts conjugués, dans le cadre d’une Union sacrée ou d’une alliance d’un autre nom, pour mettre fin aux meurtres, viols, destructions, et exactions de toutes sortes ; et pour mettre fin à l’impunité des gangs de hors-la-loi qui gangrènent notre pays. C’est ce que l’Assemblée nationale a exprimé fortement en tenant une Session d’urgence nationale sur la sécurité du peuple centrafricain du 27 juin au 1er juillet de cette année, laquelle Session d’urgence nationale s’est achevée par une recommandation qui reste malheureusement d’actualité. Mais c’est aussi au nom de cette exigence de sécurité que le Bureau de l’Assemblée nationale élargi aux Présidents des Commissions Permanentes Affaires Etrangères et Défense, le 24 août, a auditionné les ministres compétents sur les questions urgentes d’actualité nationale, dont les événements de Galafondo impliquant les fugitifs du KM5.

Un fonctionnement harmonieux des institutions de la République reposant, d’une part, sur le respect scrupuleux des prérogatives constitutionnelles des unes par les autres et, d’autre part, sur un esprit de coopération dans l’intérêt supérieur de la Nation : ainsi peut se formuler un autre des principes cardinaux auquel est attachée notre Assemblée nationale. Pour nous, cela signifie essentiellement que la nouvelle Représentation nationale, sans aucun esprit de confrontation, entend jouer pleinement son rôle de législation et de contrôle du gouvernement, sur tous les sujets essentiels de notre pays, y compris évidemment les questions de défense et de sécurité et celles qui touchent aux ressources naturelles, patrimoine commun des Centrafricains.

L’Assemblée nationale entend aussi veiller à ce que la transparence, la rigueur et l’exemplarité soient des exigences partagées par toutes nos institutions, et ceci autant dans la conduite collective des affaires de notre Nation que dans le comportement individuel des gouvernants. Ceux d’entre vous qui ont suivi la session qui a abouti à l’adoption du collectif budgétaire savent qu’il ne s’agit pas là d’un vœu pieux.

Restaurer la dignité internationale de la République centrafricaine, faire entendre notre voix dans le concert des Nations, et œuvrer à l’établissement et/ou à l’approfondissement des relations amicales et fraternelles qui lient notre peuple aux autres peuples du monde : voilà, pour finir, ainsi qu’en attestent les différentes activités internationales que la Représentation nationale a d’ores et déjà entreprises, un des horizons majeurs que notre Assemblée fixe à son action.

Honorables Députés, chers Collègues ;

Je vois notre tâche au cours de cette première session ordinaire comme celle du paysan aux premiers labours : il s’agit de débroussailler, de retourner la terre, de tracer des sillons et enfin, de planter les bonnes graines pour espérer l’enracinement de la plante et une bonne récolte plus tard. C’est dans cet esprit que nous devons aborder cette phase de notre histoire et de notre activité, dans cet esprit que nous examinerons les textes fondamentaux qui nous seront soumis, au premier rang desquels les lois organiques mettant en place les institutions prévues par la Constitution, le nouveau Règlement intérieur de notre Assemblée, les textes sur la parité et les collectivités territoriales notamment.

Le travail parlementaire pour lequel nous sommes élus est le socle de la nouvelle République. En votant les lois et en contrôlant l’action du Gouvernement, il confère une base juridique et démocratique majeure à notre Etat, et donne des repères stables et crédibles au citoyen, en même temps qu’il consolide nos relations internationales.

Les poussées de violence qui embrasent l’arrière-pays et certains arrondissements de Bangui, comme tout dernièrement à Ndomété, Kaga-Bandoro, Kouango, Koui et Bokaranga nous situent encore et malheureusement dans un contexte de l’entre-guerre.

Du fait de la grande proximité entre vous les Elus de la Nation et les populations de nos circonscriptions respectives, les questions de sécurité, de cohésion sociale et du vivre ensemble sont des défis majeurs qui conditionnent tout le processus du relèvement de notre pays et de l’unité nationale.

La crise militaro-politique des trois dernières années avait engendré une rupture du sacro-saint pacte du vivre ensemble, du respect traditionnel des aînés et des biens d’autrui ; autant de valeurs sociétales et culturelles qui ont toujours caractérisé la vie au sein de toutes les communautés nationales, ces valeurs ont été ruinées par les crimes abjects et les commissions continues des violations des droits humains les plus abominables.

Aussi, j’invite tous les collègues députés à œuvrer sans relâche et sans ménagement pour renforcer la cohésion sociale et restaurer le vivre ensemble et à se mobiliser pour la prise en charge psychologique des victimes afin de garantir un retour définitif de la paix et la concorde en Centrafrique.

Honorables Députés, très chers Collègues ;

Permettez-moi, à l’occasion de l’ouverture de cette session, d’aborder le sujet du développement de la République centrafricaine, auquel, je le sais, nous sommes tous particulièrement attachés.

Aucun pays au monde ne s’est jamais développé par procuration. Aucun peuple n’a jamais réussi en déléguant la réalisation de son avenir à un autre peuple, fut-il un peuple frère ou ami. Les belles réalisations, signes de progrès, que nous admirons et convoitons dans des pays développés ne sont pas les fruits du hasard. Ce sont les résultats du travail acharné des hommes et des femmes de ces pays qui, au prix de mille et un sacrifices, ont abouti aux réussites spectaculaires que vous voyons.

C’est dire que le développement de la République centrafricaine incombe d’abord et avant tout au peuple centrafricain et à ses dirigeants. Personne d’autre ne le fera à leur place. Cette responsabilité est la nôtre. Assumons-la avec courage. Assumons-la avec responsabilité.

La crise, tout le monde en parle. Nous en subissons encore les traumatismes tous les jours. Certains en tirent profit sans scrupules alors que les victimes centrafricaines se comptent en milliers. Mais la crise, je l’affirme, ne doit pas servir de prétexte pour baisser les bras. Nous nous devons de la transformer en opportunité pour aller de l’avant. Dans notre pays, tout est à construire et ou à reconstruire. Retroussons-nous les manches, allons de l’avant, à la conquête d’un avenir plus enviable que notre passé et notre présent.

Pour cela, mes chers collègues, nous devons avoir la paix. C’est là un désir profond du peuple que nous représentons. Il n’y a pas de temps et de lieu dans nos villes et nos villages, sur les marchés ou aux places mortuaires, dans tous les foyers, où on n’entend pas, où on ne lit pas cette proclamation déterminée : "É yé gi siriri" "É yé gi siriri".

C’est à nous, Représentants de la Nation et Pouvoir Exécutif, de concrétiser cette aspiration. Nous ne devons pas seulement désirer la paix, nous devons nous donner les moyens de la conquérir et, ensuite, de la protéger efficacement.

La paix, je le redis, est aujourd’hui le besoin primordial du peuple centrafricain. Reste une seule question que je nous pose, Honorables Députés, mes chers collègues, mesdames et messieurs: quel sacrifice sommes-nous prêts à consentir individuellement et collectivement pour obtenir une paix durable en République centrafricaine ? Je répète : quel sacrifice sommes-nous prêts à consentir individuellement et collectivement pour obtenir une paix durable en République centrafricaine ? Ce n’est pas une question théorique ; pas davantage une question philosophique. C’est une question existentielle pour notre Nation. Il nous faut lui donner une réponse précise et opérationnelle susceptible d’ouvrir pour notre pays de nouvelles perspectives de développement.

Tout comme il ne peut y avoir de paix sans désarmement, il ne peut y avoir de paix sans une véritable réconciliation. Mais il ne peut pas non plus y avoir une paix durable sans une lutte résolue contre l’impunité.

Honorables Députés, mes chers Collègues ;

Nous avons du pain sur la planche. Je sais compter sur votre disponibilité et votre engagement pour que les points à débattre et à contrôler, les lois à voter, les traités à ratifier qui seront inscrits à l’ordre du jour de la présente session soient traités avec sérieux et diligence.

Nous saisirons également cette opportunité pour finaliser et adopter le plan stratégique du développement de notre l’Assemblée nationale pour les dix années à venir. Mon ambition, c’est d’offrir aux parlementaires un cadre de travail décent et des moyens conséquents.

Sur ce, je déclare ouverte la première session ordinaire de l’Assemblée nationale.

Je vous remercie.

Le 1er octobre 2016