A l'occasion de la fête des moissons, discours de Touadera

Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale ;
Monsieur le Premier Ministre Chef de gouvernement ;
Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions Républicaines
Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement ;
Mesdames et Messieurs les Chefs des Missions Diplomatiques et des Organismes Internationaux accrédités auprès de la République centrafricaine ;
Messieurs, les Préfets ; les Sous-Préfets ;
Monsieur les Présidents des Délégations Spéciales de la ville de Mbaïki, Boda, Mongoumba, Boganda, Boganagone et de Ngotto ;
Mesdames et Messieurs les Représentants des ONG;
Distingués invités, Mesdames et Messieurs Chers compatriotes;

Fat fete des moissons oct 2016

Faustin-Archange Touadera à la fête des moissons @pr

Il y a de cela sept mois, le peuple centrafricain a placé sa confiance en ma modeste personne pour la gestion des affaires du pays.

En m’adressant à vous lors de mon investiture le 30 mars 2016, j’annonçais mes plans d’actions pour relever le niveau de vie des centrafricains rendus vulnérables par les derniers évènements de 2012 à 2015. A cette occasion, je disais que nous devons sortir des sentiers battus pour développer notre agriculture, fondement de notre économie, en vue d’assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la population, et contribuer à la croissance de notre produit intérieur brut -PIB-

J’avais également relevé que, sous mon leadership, le peuple centrafricain affrontera avec courage la sortie de crise. A cet effet, j’exprime ma fierté de voir la grande capacité de résilience du peuple centrafricain et sa détermination à se relever des récurrentes crises qui lui ont causé tant de souffrances.
En cette circonstance mémorable, mes pensées vont vers la vaillante population de la Nana-Gribizi et plus particulièrement celle de Kaga-Bandoro, victime depuis le mercredi 12 octobre 2016.
Et hier encore la population de Ngakobo est victime des violences aveugles et barbares perpétrées par les ennemis de la paix. Ce nouveau déferlement de violences a empêché ces compatriotes de se joindre à nous pour célébrer la journée mondiale de l’alimentation ici à Mbaïki.

Mes chers compatriotes ;
A l’instar des autres pays du monde entier, la République centrafricaine célèbre aujourd’hui 16 octobre 2016, la 71e journée mondiale de l’alimentation -JMA-.
Depuis la dernière organisation de la JMA en 2009 à Obo, nous voilà enfin dans la ville de Mbaïki pour renouer avec cette manifestation d’une grande importance qui est une occasion de rencontres de tous les producteurs agro sylvo pastoraux, symbole de la marche vers la paix, la réconciliation et la cohésion sociale.

Cependant, je voudrais profiter de l’organisation de cette Journée instituée par la FAO depuis 1945, pour délivrer un message à la nation, celui relatif au thème de la JMA de cette année, à savoir "le climat change, l’alimentation et l’agriculture aussi". Cette thématique nous interpelle tous, en tant qu’acteurs de production des produits agricoles et de produits forestiers non ligneux et pastoraux. Il nous interpelle à la préservation du climat pour la sauvegarde de la vie humaine et animale.

Pour mémoire, en septembre 2015, "193 pays se sont réunis à New-York, lors du sommet des Nations Unies sur le développement durable, pour s’engager à éliminer la pauvreté et la faim, à protéger et à garantir la prospérité de tous leurs habitants. A l’issue de ce sommet, 177 parties prenantes à la convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) se sont retrouvées à New-York pour la signature de l’Accord de Paris sur le climat pour garantir la sécurité alimentaire". C’est dire que l’enjeu est de taille.

L’échéance fixée pour atteindre l’objectif "faim zéro" est ambitieuse et passe nécessairement par la lutte contre le changement climatique. La RCA ne peut pas être à la marge de ce processus. Il est temps de nous mobiliser plus que jamais pour sortir notre pays de ce cycle d’insécurité alimentaire et de malnutrition, reflet des récents évènements dramatiques qui ont plongé notre pays dans cette situation de marasme.

Mes chers compatriotes;
C’est autour de 2007/2008 que l’alimentation l’énergie et le climat sont considérés selon le thème du moment proposé par la FAO, comme une équation à résoudre par tous.
Nous devons donc adapter l’agriculture au changement climatique pour tracer la voie à l’atteinte de l’objectif "faim zéro", car le climat est le socle de production quantitative et qualitative sur le plan agricole et pastoral.

Lorsque le climat entraîne une forte température, beaucoup d’arbres sont coupés, car desséchés. On assiste à la rareté des eaux de pluies et aux tarissements des eaux de surface et souterraines ; l’érosion éolienne emporte les éléments nutritifs à la surface des sols agricoles, les rendant ainsi infertiles. Les herbes fraiches deviennent rares pour la nutrition animale tant sauvage que d’élevage. La nourriture et l’alimentation deviennent l’objet d’une rareté : c’est l’insécurité alimentaire suscitée.
Face à de telles perturbations inopportunes, comment adapter l’agriculture à celles-ci pour aller vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre ?

Les éléments de réponse sont intégrés dans l’application des techniques culturales durables, la gestion rationnelle des ressources naturelles, l’amélioration de la fertilité des sols agricoles par la technique d’agro foresterie, de la gestion de l’eau, la prévention aux chocs climatiques, la création d’une pêche et une aquaculture résilientes grâce à des cages et étangs résistants aux tempêtes.
J’invite à cet effet Monsieur le Ministre de l’agriculture et du développement rural et son homologue de l’élevage et de la santé animale ainsi que la Ministre de l’environnement et les ONG nationales et internationales à vocation agro sylvo pastorale à s’atteler aux techniques agro forestières pour atténuer les effets désastreux susmentionnés.

Mes chers compatriotes;
M’adressant à vous sur la situation sécuritaire du pays, alors que quasiment, tous les indicateurs allaient au vert, pour une reprise de vie normale, des embuches sont érigées partout, donnant aux paysans l’inaccessibilité aux chantiers agropastoraux et forestiers pour le ravitaillement en nourritures diverses.
Ce plan de déstabilisation dont le point culminant a consisté en des actes de grand banditisme et de grande criminalité ont engendré de lourdes pertes en vies humaines.
Ces agissements nuisibles, qui ne peuvent nous conduire au relèvement, sont de nature à nous éloigner de celui-ci et n’auront pour conséquence que de prolonger, voire d’aggraver la souffrance du peuple centrafricain qui a déjà assez souffert et qui n’aspire plus qu’à tourner la page sombre du passé, afin de regarder vers un avenir paisible et de développement durable.

Un programme conjoint de sécurité nationale "gouvernement et forces internationales" est à jour pour la correction des malfaiteurs afin de permettre aux agriculteurs, éleveurs, pêcheurs et exploitants forestiers à vaquer à leurs occupations habituelles de ravitaillement de la population en aliments.

J’adresse aux familles agricoles, pastorales et forestières dont des proches ont été victimes pendant les périodes de crise du pays, mes condoléances les plus émues et ma sincère compassion.
J’exprime à l’endroit des nombreuses victimes et propriétaires des maisons incendiées, des greniers mis en sac ou cramés, mes ardents vœux de réconfort moral. Je promets que la justice est engagée à poursuivre les auteurs des actes indescriptibles et macabres.

L’insécurité est aujourd’hui l’équation N°1 de la République centrafricaine.
Les questions sécuritaires doivent nécessairement être abordées dans un cadre de dialogue et de conjugaison d’efforts avec les forces nationales et internationales en vue de mettre en place une stratégie appropriée pour la réduction des risques.

La mise en œuvre des programmes de Désarmement, Démobilisation, Réinsertion et Rapatriement (DDRR) nous engage tous dans la perspective de réduire les risques perpétuels d’insécurité et d’inaccessibilité des agriculteurs à leurs fermes. La mise en place d’un programme de création d’emploi concret pour les jeunes dans les meilleurs délais, avec l’appui des partenaires en cours.

Mes chers concitoyens;
J’ai inlassablement plaidé pour que l’espoir qui renaît en République Centrafricaine soit soutenu et accompagné par la communauté internationale. Les partenaires ne sont pas restés insensibles à ce plaidoyer et sont entrain de répondre à mes appels.
Je saisis encore une fois cette occasion pour saluer l’engagement de toutes les parties prenantes à la JMA 2016.
Aujourd’hui, les populations déplacées et réfugiées ne demandent qu’à retourner chez elles et à retrouver leurs activités habituelles si des moyens leur sont fournis pour reconstruire leurs habitations brûlées ou détruites ainsi que leurs greniers. C’est dans ce sens que je demande au Gouvernement Centrafricain et les partenaires à leur donner la chance de reprendre une vie normale à travers la fourniture d’une assistance qui leur permette de se relever.

Très chers compatriotes;
A toutes et à tous, patriotes agriculteurs, composantes de tout bord de notre pays, je demande votre implication directe, active, aussi bien individuelle que collective au sauvetage urgent de notre pays.

Jeunesse centrafricaine;
Tu es la future actrice agro sylvo pastorales de demain. Détournes-toi des actes de violence et de pillage qui se soldent souvent par des échecs et perte de vie. En Centrafrique, des structures sous-tutelles des départements de l’Agriculture et du développement rural, de l’élevage et des industries animales "ACDA, ICRA, CREF, CTDR, ENEB, ISDR ainsi que les ONG nationales et internationales" sont disponibles pour tes formations souhaitées dans les petits métiers de survie agro pastoraux.

Je te lance un appel historique à la résilience vis-à-vis des crises socio-économiques. Mieux vaut se doter d’un métier du genre "Pépiniériste, Aviculteur, Apiculteur, Pisciculteur, Aménagiste des espaces verts …" pour lutter contre l’exode rural, l’incivisme et l’intolérance. Tu dois dire non à la paralysie socio-économique afin d’éviter le maintien éternel de ton pays dans la misère.
Tu dois dire non aux pillages, à la destruction, aux actes de vandalisme de tout genre qui éloignent les investisseurs de la République centrafricaine.

Ne te laisse plus instrumentalisée pour aller dans la rue. Je te demande de te réveiller, intègres-toi dans la vie active et demeure patriote.
Chers compatriotes agriculteurs, éleveurs et producteurs des produits forestiers non ligneux
Celui qui aime son enfant, lui offre l’éducation, la formation, l’accès à l’emploi.
Les partenaires ont répondu favorablement à mon appel et le Programme d’Urgence pour le Relèvement Durable de la RCA est élaboré par les gouvernement et le programme en faveur des jeunes et des femmes sont en bonne place.

Femmes de Centrafrique;
Vos soutiens et votre solidarité sont attendus pour l’éducation de nos enfants déscolarisés afin d’assurer leurs avenirs. Mobilisez-vous auprès de vos époux, de vos frères et de nos enfants pour les engager à œuvrer pour la paix durable sans laquelle, la reconstruction ne peut se faire.
Pour finir, je tiens à remercier tous les acteurs agricoles, pastoraux, forestiers qui n’ont ménagé aucun effort pour la réussite de cette JMA 2016 à Mbaïki.

Que Dieu bénisse la République centrafricaine. Qu’il nous aide à rétablir le calme et la paix en vue d’assurer la sécurité alimentaire et rendre nulle la faim par la gestion de nos ressources naturelles conditions sine qua non de maintien du climat et à évoluer résolument vers le relèvement de notre pays.
Vive la République centrafricaine.
Je vous remercie.

Le 19 octobre 2016