Bangui : Ou en est la cour pénale spéciale ?

L'ONG Human Rights Wathc a déclaré jeudi 17 mai 2018 que "les récentes violences en Centrafrique font de la nouvelle cour pénale spéciale du pays un moyen particulièrement important de rendre justice aux victimes de crimes atroces commis en Centrafrique au cours des conflits".

Le dernier rapport de 34 pages de Human Rights Watch estime que la cour pénale spéciale "aura besoin de davantage de soutien de la part des Nations Unies ainsi que des gouvernements bailleurs de fonds afin de mener des poursuites pour les crimes graves, notamment des meutres généralisés, des viols et des violences sexuelles ainsi que des destructions de maisons.

Le rapport ayant pour titre  ‘En quête de justice’ : La Cour pénale spéciale, une nouvelle opportunité pour les victimes en République centrafricaine, examine les progrès, les obstacles et les défis pour la cour pénale spéciale dans ses phases initiales. S’appuyant sur l’observation régulière de la cour pénale spéciale et sur des entretiens avec des représentants des victimes, des activistes, des membres du personnel de la cour pénale spéciale, des représentants des Nations-Unies, des bailleurs de fonds et des représentants du gouvernement, Human Rights Watch présente des observations sur l'état actuel du développement de la cour pénale spéciale.

Elise Keppler directrice adjointe du programme justice internationale à Human Rights Watch a décalré "Il n'y a presque pas eu de justice pour les crimes les plus graves commis en République centrafricaine ces dernières années, et cette impunité alimente encore plus d'abus" ajoutant "la cour pénale spéciale est un effort sans précédent afin d’aider à rendre la justice pour les crimes les plus graves, mais les partenaires internationaux doivent fournir un plus grand soutien politique et financier pour qu’elle puisse réussir."

La capitale Bangui connait depuis plusieurs semaines de sérieux regains de violence.201805ij car sccfront

des membres de la cour pénale spéciale@icc

La cour pénale spéciale offre une chance de rendre la justice au niveau national et elle pourrait également servir de modèle à d'autres pays qui cherchent à rendre la justice pour les crimes internationaux dans leurs systèmes nationaux.

Depuis 2017, la cour pénale spéciale a avancé avec les nominations du procureur spécial, des juges, des enquêteurs et des administrateurs.

Des règles pour régir ses opérations ont été rédigées et la cour pénale spéciale a commencé à conduire des activités de sensibilisation auprès de la population locale. La cour  pénale spéciale compte sur des contributions volontaires pour fonctionner, et la majorité du financement permettant d’assurer son mandat de 5 ans renouvelable n'a pas encore été obtenue.

Assurer la sécurité du personnel de la cour pénale spéciale et protéger les victimes et les témoins sera difficile, car la violence perdure sur l'ensemble du territoire du Centrafrique. Il n'existe pas de programme opérationnel d'aide juridique en Centrafrique pour les accusés indigents, et les centres de détention ne sont pas adaptés. Les enquêteurs et les administrateurs centrafricains travaillant à la cour pénale spéciale manquent d'expérience dans les affaires de crimes d'atrocité, et le parlement doit encore adopter le Règlement de la cour pénale spéciale.

Au cours des recherches menées depuis 2013, le désir de voir les responsables de la violence traduits en justice devant les tribunaux est demeuré intact parmi les victimes, les activistes et les membres de la communauté juridique. Une victime qui travaille avec une association de victimes de crimes, a déclaré à Human Rights Watch fin 2017 : "Des personnes qui devraient déjà être reconnues comme des criminels continuent de commettre des crimes. Les victimes recherchent la justice. Elles veulent voir les auteurs et leurs complices tenus pour responsables".

La cour pénale spéciale, établie par une loi organique en 2015, est intégrée dans le système judiciaire national de la République centrafricaine, mais elle est dotée de juges, de procureurs ainsi que d'administrateurs internationaux et centrafricains. La cour pénale spéciale est compétente pour les crimes graves commis depuis 2003 et elle fonctionnera aux côtés de la cour pénale spéciale -CPI-, qui a 2 enquêtes en cours sur des crimes commis en Centrafrique. La CPI est susceptible de ne juger qu'un nombre limité de cas étant donné ses ressources et son mandat limités.

Les victimes jouent un rôle important à la cour pénale spéciale. En plus de servir de témoins potentiels, les victimes peuvent se joindre aux procédures pénales en tant que parties civiles. Les parties civiles peuvent prendre part à la procédure, aux côtés du procureur et de l’accusé, ce qui est une caractéristique des systèmes de droit civil. Les parties civiles peuvent prendre des mesures telles que présenter des pièces au dossier, demander une enquête ou faire en sorte de faire avancer une enquête, et examiner des témoins.

En guise de conclusion Elise Keppler souligne que "la cour pénale spéciale a réalisé d'importants progrès depuis 2017, et la demande pour cette cour est élevée en République centrafricaine" ajoutant "la justice pour les crimes les plus graves n'est pas une panacée, mais des procès crédibles peuvent faire respecter l’État de droit et signaler que les responsables de crimes graves peuvent être tenus responsables, marquant ainsi un nouveau chapitre pour le pays".

Pour de plus amples informations rendez-vous sur https://www.icc-cpi.int/

Le 17 mai 2018