Bangui : le 20 janvier 1979 Jean-Bedel Bokassa s'exprimait devant les parents d'élèves

J’avais décidé de rencontrer ,les parents d’élèves pour la première fois depuis que je suis chef de l’Etat, il y a 13 ans aujourd’hui. Il y a 13 ans je n’ai jamais rencontré les parents d’élèves parce que je pensais qu’il n’y avait pas de problèmes, malheureusement aujourd’hui un problème s’est posé avec les parents d’élèves, lesquels je désigne comme responsables à part entière de la situation qui vient d’être créée.Jean bedel bokassa 1

En effet, depuis 13 ans jamais je n’ai assisté à de telles manifestations de mécontentement populaire. Malheureusement cette année, les élèves ont donné le ton à une manifestation populaire, saccageant les magasins, pillant les maisons, tuant des personnes. Cette faute qui sera saisie par le tribunal de l’Empire centrafricain, est placée sous la responsabilité des parents d’élèves qui encaissent la totalité des charges, car en ma qualité de chef de l'Etat et de président à vie du MESAN, je porterai plainte à la justice.

L’objet de votre convocation n’avait pas pour but de vous arrêter, je ne suis pas la justice, je ne vous arrête pas mais je voulais dire clairement aux parents d’élèves la responsabilité qu’ils endossent devant la situation qu’ils ont causée au pays. Les élèves ont prétendu manifester à propos de tenues, vous voyez maintenant ce que coûte chaque manifestation ! Ce n’est plus une affaire de tenues maintenant, c’est devenu une affaire de politique, et malheureusement, quelle que soit la position du tribunal, le coupable numéro un, dans cette affaire, ce sont les parents d’élèves !

Eh bien, puisque nous sommes des citoyens, tous les parents d’élèves répondront aux questions de justice. C’est tout. Toutefois il est à signaler que vous n’avez pas prévu, quand vous avez donné votre accord à vos enfants pour manifester, pour détruire le pays, vous n’avez pas prévu l’immixtion des étrangers qui se sont immiscés dans cette affaire, car les étrangers, africains comme nous et non-africains, se sont mêlés à cette affaire et ont exploite la situation en leur faveur. Je pense que vous me comprenez ! Et qui payera la responsabilité I C’est vous et vos enfants, c’est vous !

A propos de tenues, il faut que les élèves, les étudiants, les élèves des écoles, les étudiants de toutes les disciplines scolaires, de tous les enseignements, de tous les centres d’éducation et d‘enseignement culturel,moral de l’Empire centrafricain soient dotés de l’uniforme, portent de l’uniforme, ils doivent porter l’uniforme qui les désigne comme étudiants pour justement permettre à toutes les forces publiques de l’Etat d’accorder davantage d’attention envers eux, de leur venir au secours, de leur venir en aide, de les distinguer des brigands, parce que il existe de nombreux enfants non scolarisés, de nombreux enfants brigands qui commettent des fautes, qui pillent le pays, qui volent ... Alors, la position du chef de l’Etat centrafricain est de dire : Oui, les élèves porteront l’uniforme, et l’école sera ouverte dès que les élèves auront accepté le conseil proposé par le chef de l’Etat pour porter l’uniforme.

Même s’ils avaient porté cet uniforme demain, toutes les écoles seront ouvertes demain, mais l’uniforme doit être porté pour permettre aux services de l’ordre de leur apporter tous les secours, tous les concours, tous les soutiens. Mes enfants aussi porteront l’uniforme, car je suis centrafricain avant d’être tout ce que l’on peut penser, mais vouloir dire que les enfants ne peuvent pas porter l’uniforme, je ne suis pas d’accord ! Il faut que les enfants portent l’uniforme car dans beaucoup de pays africains, dans beaucoup de pays et je cite même, avec respect

  • la Côte-d’Ivoire : tous les élèves portent l’uniforme,
  • le Gabon : tous les élèvent portent l’uniforme,
  • la France : tous les ékves portent l’uniforme,
  • le Cameroun : tous les élèves portent l’uniforme,
  • le Sénégal : tous les élèves portent l’uniforme.
  • Et alors, pourquoi pas nous ? Pourquoi pas nous ? Pourquoi pas ?
  • Qui vous a dit que c’était une brimade quand on a demandé aux élèves de porter l’uniforme ? Qui a dit que c’était une brimade ?
  • Contraire ! Contraire ! C’est un respect qu’on veut attribuer aux élèves et aux étudiants.

 

Maintenant à propos de prix, je ne connais rien. Je ne sais pas le problème des prix. J’aurais tant souhaité que si vous, parents d’élèves, vous avez constaté des problèmes de prix, il fallait quand même demander, en dernier ressort, à voir le chef de l’Etat, pour lui soumettre le problème, parce que je ne voulais pas que l’on fasse du trafic avec le prix, je voulais qu’il y ait un texte officiel fixant le prix de l’uniforme des élèves et qu’-on désigne des organismes officiels pour faire ce travaillà, qu’on ne confie pas à n’importe quel tailleur ou à n’importe quel organisme pour ne pas faire de trafic, je ne suis pas d’accord non plus à ce que ces tenues coûtent exclusivement cher, car il faudrait que le prix de ces tenues soit raisonnable pour permettre aux parents qui ne sont pas tous des fonctionnaires ! Dans un pays on ne peut pas tous être fonctionnaires ! Dans un pays, il y a des paysans aussi, et il se trouve que dans un pays, seuls qui ont des ressources, seuls qui ont de l’argent, ce sont les paysans !

Evidemment les fonctionnaires sont des compatriotes qui ont décidé de, louer leurs services à leur Etat, à leur patrie et en ce moment-ci, l’Etat a des difficultés, l’Etat ne paye pas régulièrement les fonctionnaires. Je le sais. Je le sais, mais c’est une conséquence comme une autre, parce que je suis resté au pouvoir, président du gouvernement et président de la République pendant 10 ans.

En 10 années, je vous ai régulièrement payés jusqu’au 4 décembre 1976, date à laquelle le congrès avait décidé une nouvelle constitution, date A laquelle le congrès m’a demandé de rentrer dans mon village natal.

Je suis maintenant situé dans mon village natal. Il y a 2 ans maintenant que je ne parle presque plus à la radio. II y a 2 ans que je n’ai pas de contact avec vous. Qu’est-ce que vous me reprochez ? Je suis au village pour faire de l’agriculture, pour faire de l’agriculture, pour faire de l’élevage.

Je suis tranquille là-bas. Je vous ai laissé la ville de Bangui. Y a un gouvernement qui m’a remplacé, je ne suis pas président du gouvernement, si vous avez constaté que ce gouvernement ne respecte pas vos droits, il fallait venir me dire et, avec vous, on allait certainement étudier quelque chose de nouveau parce que moi non plus je ne suis pas d’accord ce que le gouvernement néglige de payer vos droits. Les droits sont choses acquises. il faut que le gouvernement vous paye vos droits, et si le gouvernement ne vous paye pas vos droits, pour ceux qui sont fonctionnaires, il faut me le dire, c’est vrai parce que moi je ne cesse pas de le dire au gouvernement. Je le dis tous les jours au gouvernement parce que je me renseigne et je dis : "Vous avez payé les fonctionnaires ?"  "Non, pas encore." "Vous avez payé ?" "Non." " Qu’est-ce qu’il y a ?" " il y a ceci, il y a cela !". Car le pays est pourri maintenant avec la présence des libanais, des voleurs !

Les libanais sont des voleurs ! Ils pillent notre pays ! Quand on va demander les impôts du gouvernement, les taxes du gouvernement, tout ce qui revient au gouvernement, eux ils rendent 1 000 Fcfa aux agents de l’Etat, et les agents de l’Etat se contentent de prendre 1 000 Fcfa et foutent le camp, ces agents ne perçoivent pas les taxes de l’Etat, mais de mon temps c’était pas, comme ça ! C’était pas comme ça ! Je faisais percevoir les taxes de l’Etat, je faisais percevoir les impôts de l’Etat, mais l’actuel gouvernement qui ne fournit pas suffisamment d’efforts !

Alors il y a donc des problemes, nous sommes tous des centrafricains, il faudrait qu’on se rencontre pour régler ce probleme, mais il n’est pas question à chaque manifestation ou à chaque cas de mettre la totalité des responsabilités sur moi. Je ne suis pas Dieu ! Je ne suis pas Dieu ! Je ne suis pas Dieu ! Je suis un citoyen centrafricain comme vous, mais quelqu’un qui respecte les lois de son pays, je respecte les lois de mon pays, s’il y a des citoyens qui ne respectent pas les lois de leur pays, en tout cas ce n’est pas mon cas ! Parce que qui dit soldat, dit respect, dit homme discipliné. je suis un homme qui éprouve le sens de respect envers mon pays, l’Empire centrafricain, et si nous étions tous pareils ? Je crois que notre pays serait un pays fort, mais s’il y a des gens parmi nous qui veulent rendre justice eux-mêmes, faire la justice eux-mêmes, alors ce sera le désordre dans le pays, personne ne réussira.

Tel était le propos que je voulais vous tenir parce que je n’habite pas la ville de Bangui, depuis la Constitution je suis au village, dans mon village natal à 80 kilomètres de Bangui, je cultive la terre, je garde mes bœufs que vous m’avez donnés. Vous m’avez donné 2 600 bœufs, je vous remercie beaucoup, c’est vous qui me les avez donnés, avec votre cœur, pour l’amour et les sentiments que vous avez pour moi, je suis reconnaissant envers vous, mais laissez-moi garder les bœufs que vous m’avez offerts !

Laissez-moi aussi cultiver du manioc pour nourrir les habitants de la ville de Bangui ! Mais vous me mettez toutes les charges sur le dos ! Ce n’est pas moi ! Cette affaire est une affaire du gouvernement ! Il faut lire la constitution ! Il faut respecter la constitution ! Ne courez pas toujours après moi !Bokassa ! Bokassa ! Bokassa !

Mais si je n’étais pas venu hier à minuit, si je n’étais pas venu pour arrêter vos désordres, ici, a Bangui, je crois même que le gouvernement n’aurait pas été capable de pouvoir arrêter ça ! Il faut le dire, mais je suis venu, je suis arrivé à Bangui, à minuit, pour imposer l’ordre et la paix et je l’ai fait ! Est-ce que j’ai réussi ?

Est-ce que je n’ai pas encore réussi ? Mais dans tous les cas, je suis décidé a le réussir, même quitte a verser mon sang par terre pour vous, je suis décidé à faire maintenir la paix coûte que coûte.

Voila ce que je voulais vous annoncer, je dois encore une fois vous dire merci beaucoup d’être venus. Nous sommes un pays aussi comme tous les autres pays en voie de développement, nous avons tous les organes législatifs, nous avons le département de la Justice qui est là pour examiner tous les problèmes ! Alors vous avez demandé aux enfants de saccager la ville de Bangui, de détruire le pays, les enfants ont obéi aux ordres de leur père, et aux ordres des hommes politiques et parmi les enfants de l’école, il n’y a pas eu seulement que vos enfants, seulement vous qui n’êtes pas ministres. Il y a eu des enfants de ministres et les ministres sont des hommes politiques. Il y a eu leurs enfants qui ont poussé vos enfants a détruire la ville, ça aussi il faut tenir compte. Si les ministres veulent pousser leurs enfants, laissez les ministres pousser leurs propres enfants, mais je vous conseillerai toujours de garder vos enfants avec vous, de leur faire de bons conseils, de leur dire de ne pas être les premiers à courir l’aventure.

On ne peut pas dire à son propre enfant : "Va tuer ton pays ! va tuer ton grand-père, ta grand-mère, ta sœur, ton frère, ceci ...". On ne peut pas dire à un enfant, dès qu’on le dit eh bien ce n’est plus l’enfant qui va le faire. Mais y a des hommes politiques aigris, y a ceux qu’on a foutu la porte parce qu’ils avaient volé, ils avaient détourné, mais qui est-ce qui guette les occasions ? Alors ceux-là vont commettre,e encore le pire et puis y a les étrangers, y a les étrangers à commencer par les  libanais et les autres africains comme nous, qui se sont mêlés à cette histoire la. Ah ! il faut que vous soyez prudents ! Vous avez fait des enfants,c’est pour mieux les préparer, leur donner un avenir meilleur, mieux les former pour la Nation, pour le pays. Vous n’avez pas fait des enfants pour sacrifier, pour dire : "Allez la-bas faire la guerre, allez vous tuer."

Si j’avais autorisé l’armée a faire usage du feu comme il le fallait, eh bien aujourd’hui, moi je crois que, il aurait eu presque la ville de Bangui nettoyée, mais j’ai refusé, j’ai refusé. J’ai dit non ! "Attention l’armée, respectez !". Mais avec vos enfants et avec les autres vous m’avez envoyé des militaires A l’hôpital, vous m’avez tué aussi des militaires à l’hôpital et vous ne devez pas penser a ceux-la, les gens qui ont des fusils !

Vous les envoyez a l’hôpital, vous : les blessez, vous leur tirez dessus avec des flèches, avec ceci, avec cela, ce n’est pas beau. Vous ne devez pas dire à vos enfants de faire ça. Mais je sais maintenant que ce ne sont pas vos enfants qui ont fait cela.

Ce sont les hommes aigris,les hommes politiques et ce sont aussi les enfants des hommes politiques, les enfants des ministres, des chefs de cabinet, des directeurs de cabinet, les anciens et ceux qui sont actuellement,, tous ceux qui sont ex-ministres, ex-chefs de cabinet, ex-directeurs de cabinet ou ex-agents de quelqu’un quand il est vraiment devant une faute ! Mais moi vous m’avez fait retourner dans mon village, mais à chaque problème politique vous me mettez dedans !

Quelle est ma situation dans le problème de non-paiement des fonctionnaires ? Si non je suis chef de l’Etat: d’accord, mais je ne cesse pas de le dire au gouvernement : c’est une affaire de gouvernement.

  • Il faut distinguer le gouvernement avec la personne propre de Monsieur Bokassa !
  • Je ne suis plus président du gouvernement !
  • Il faut respecter la constitution !

 

Mon intervention est terminée, si quelqu’un parmi vous avait quelque chose à dire, je serais tout disposé à l’écouter. 

Discours de Jean-Bedel Bokassa - le 20 janvier 1979

Le 20 janvier 2020