Centrafrique : "le silence de la forêt", d'Etienne Goyémidé

En 1984 paraît "le silence de la forêt", premier roman du centrafricain Etienne Goyémidé.                             Etienne Goyémidé@st

Etienne goydemieCe qui frappe, dans le roman, c’est la masse de renseignements qu’il donne sur les Pygmées Parmi lesquels le héros est parti vivre. D’abord sur leur environnement : cette forêt majestueuse, imperturbable, immense et fraîche, aux arbres gigantesques "qui semblent se téléphoner par l’intermédiaire des lianes de toutes tailles qui les enroulent, les pénètrent, les chevauchent et les unissent".

D’innombrables ruisseaux y serpentent ; la pluie y fait partie de la vie quotidienne les trois quarts de l’année et, même en saison sèche, les orages s’y abattent dans le silence des insectes, le fracas des branches et les hurlements de l’ouragan. Dans l’humidité du sous-bois, "les parfums des fleurs, les odeurs des fruits pourris, les miasmes des vases s’emmêlent et se confondent en une réalité sans nom." Le campement des Pygmées est situé dans une clairière où hommes et jeunes gens ont abattu des arbres pour dégager le terrain.

Les huttes y "sont disposées en ordre dispersé, un ordre qui, nous dit-on, est toujours significatif et évolue constamment, révélant amitiés et querelles, variant selon les moments de la vie. Au centre de la clairière, le lecteur découvre le feu. Il éclaire le camp la nuit. C’est autour de lui qu’ont lieu les réunions et les veillées. C’est lui qui, le soir de la fête des Jarres, cuit les ustensiles fraîchement sortis de chez la potière. Il cuit aussi les aliments, grille ou fume la viande, sèche les peaux de bêtes et durcit les bouts des sagaies et des flèches. Le mariage se déroule, pour ainsi dire, sans cérémonie : le jeune homme prend simplement la jeune fille de son choix et en fait sa femme. Tous deux vivent quelque temps à l’écart de la routine du camp, puis ils rejoignent le groupe.

Goyémidé nous donne aussi des détails sur la vie politique de cette société qu’il décrit toujours sans jugement de valeur. "Pour qui voudrait absolument découvrir, en ce campement de Pygmées, une certaine structure politico-administrative, je dirais simplement que la communauté est guidée par une sorte d’assemblée de sages, dont le personnage central pour l’heure se trouve être (...) mon médecin aveugle, le patriarche du village. J’emploie le mot "guider" parce que les termes comme présider, administrer, gouverner, régir, seraient impropres, malséants et donneraient une fausse idée de leur mode de vie".

Etienne Goyémidé naît le 22 janvier 1942 à Ippy dans une famille paysanne, où les contes de sa grand-mère bercent son enfance. Après des études de sciences de l’éducation et d’anglais, il devient enseignant puis dirige l’Ecole normale d’instituteurs de Bangui. Il sera nommé ministre de l’Enseignement puis ambassadeur honoraire de l’UNESCO. Attiré par le théâtre, il fait partie de la Troupe des Griots avant de diriger la Troupe nationale de Centrafrique. Le silence de la foret                                                                                                                         @st

  • Son premier roman, "le silence de la forêt" en 1984 est un récit initiatique situé chez les Pygmées de la forêt équatoriale.
  • Dans son second roman, "le dernier survivant de la caravane" en 1985, le vieux Ngalandji raconte le drame de son village du pays Banda, vidé de ses habitants après une razzia esclavagiste, dont il est le dernier survivant.

 

Romancier, poète et dramaturge, Etienne Goyémidé sera plusieurs fois lauréat du concours RFI de la meilleure nouvelle de langue française.  Il meurt le 17 mars 1997.

Thierry Simbi

Le 27 avril 2016