La Centrafrique connaît sans doute une crise sans précédent de son histoire avec des conséquences inquantifiables.
La communauté internationale et le conseil de sécurité de l’ONU ont répondu favorablement à la détresse d’un pays agonisant et sous perfusion. Un processus démocratique ou un protocole de sortie de crise a été mis en place à travers un régime exceptionnel de transition. Dans le souci de normaliser, de réguler le flux des armes de guerre et de sécuriser durablement le pays, le conseil de sécurité de l’ONU a imposé unanimement un embargo sur les armes de guerre depuis 2013. Bernard Selemby-Doudou@bsd
L’embargo sur les armes est une mesure temporaire et coercitive interdisant à tous pays de livrer -ventes, fournitures- des armes au pays sous embargo ou de faire transiter des armes via leurs frontières. L’embargo est généralement assorti de conditions et suivi par un comité de pilotage. Cet organe composé d’experts évalue et apprécie la nécessité de la levée de l’embargo et dresse un rapport détaillé au conseil de sécurité de l’ONU.
La levée de l’embargo est un long processus et oblige le pays puni de fournir des garanties à la communauté internationale -stockage, utilisation des arme- en passant par une réforme des forces de sécurité. Compte tenu de la fragilité des conditions sécuritaires du pays, le conseil de sécurité de l’ONU avait prorogé l’embargo d’une année chose difficilement acceptée par la société centrafricaine. Entre temps et suite à la diplomatie dite agissante, la Russie a forcé la main du conseil pour arracher la levée partielle de l’embargo après moult hésitations des autres puissances. Alors que tout le monde espérait la levée de l’embargo cette année, le conseil de sécurité de l’ONU proroge contre toute attente l’embargo jusqu’au 31 janvier 2019 par le biais de la résolution 2339.
Le paragraphe premier de cette résolution parle de l’embargo sur les armes, tandis que le paragraphe 10 de la résolution 2339 évoque l’interdiction de voyager des personnalités désignées par le comité de suivi et enfin les paragraphes 13, 14 et 15 concernent le gel des avoirs. Les raisons de la prorogation soutenues par la France se résument aux risques de guerre civile, l’insécurité des humanitaires et l’occupation des 3/4 du territoire national par les groupes armés. Cette décevante sanction inattendue, incomprise et frustrante laisse le citoyen lambda perplexe, dubitatif, craintif et interrogateur :
- À l’orée de la deuxième année de mandature, le pouvoir n’a t-il pas pu négocier les conditions de levée de l’embargo ?
- S’agit-il de l’incompétence ou de l’incapacité à fournir des garanties crédibles ?
- Le pouvoir a t-il bien compris les conditions de levée de l’embargo ?
- Le pouvoir peut-il de façon progressive décrire au peuple les efforts consentis en faveur de la levée de l’autorité l’embargo depuis sa mise en place ?
- À ce rythme, l’embargo couvrira t-il la mandature ?
- Que peut-on faire pour stopper cette spirale de punition ?
- N’eut été l’audace de la coopération russe, les bataillons formés devraient continuer à jouer aux jeux de société dans les casernes ?
- À quoi servirait alors la levée partielle de l’embargo devant la puissance de feu des groupes armés non conventionnels ?
- L’implication du pouvoir dans la tentative de putsch en Guinée équatoriale a t-elle contribué à la décision de proroger l’embargo ?
- Le rappel de l’ambassadeur équato-guinéen en poste en Centrafrique confirme-t-il l’implication du pouvoir dans la tentative de putsch ?
- Ce paramètre a t-il pesé dans la prorogation de l’embargo ?
- Cette mise en veille de relations diplomatiques associée à l’évasion spectaculaire des militaires congolais dans une prison hautement sécurisée confirme t-elle notre isolement au niveau de la sous région ?
- Si tel est le cas, quelles sont les conséquences de cet isolement pour notre nation sachant que la Guinée équatoriale est actuellement la locomotive financière de l’organisation sous régionale ?
Contrairement aux déclarations d’apaisement des six émissaires de la CEMAC réunis à Bangui, l’inquiétude de l’isolement ainsi que de ses conséquences sont palpables. Dans cette cacophonie diplomatique, une grande incompréhension s’empare de l’opinion nationale.
- Comment la Russie qui n’est pas partie prenante au processus de paix a réussi en peu de temps à obtenir la levée partielle de l’embargo là où la Centrafrique n’a pu en sept trimestres ?
- Le pouvoir mesure t-il l’enjeu de guerre inédite entre les puissances en territoire étranger ?
- Qui avait initié cette piste russe dans ce bourbier ?
- Était-il une bonne ou mauvaise idée ?
Nous pensons que c’est une première en terre africaine que deux contingents des deux membres du conseil de sécurité de l’ONU cohabitent concomitamment avec les casques bleus. Dans ce quiproquo qui semble s’installer durablement, nous estimons qu’il est temps que le pouvoir arrête la politique politicienne, l’attitude du politiquement correct et de dire la vérité au peuple sur leur incapacité à tenir le cap.
L’amateurisme à assez duré, il est tellement épidermique que les efforts consentis ne sont pas visibles et ne répondent pas aux aspirations du peuple. Il semble qu’il y a une série de consultations pour remanier encore le gouvernement ?
Si c’est pour reconduire encore le premier ministre qui est totalement lessivé, c’est qu’ils n’ont encore rien compris de la souffrance du peuple. 2021 tranchera.
Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.
Paris le 2 février 2018
Bernard Selemby-Doudou
Juriste, administrateur des élections.