Jean-Prosper Mounoubaï est né le 27 juillet 1933 à Bossangoa.
Il est le petit-fils de Yon-honbel, chef du village de Mandji (sous-préfecture de Yamodo dans la région du Logone oriental) à quelques kilomètres au nord de la frontière centrafricaine. Son père, Mbayen, né sur le territoire tchadien, épousa Madion, Kaba du village Bêlé près de Markounda. Madion devient veuve peu avant la naissance de leur fils. Elle décida d’habiter chez un de ses frères à Paoua.
C’est en s’y rendant qu’elle donna naissance, en chemin, à son fils qu’elle appela Mounoubaï qui veut dire en langue locale "héritier du pouvoir." L’enfant fut enregistré à l’état civil de Bossangoa reçut le prénom de Jean-Prosper et acquit la nationalité centrafricaine de la maman. Sara Yambod de confession protestante, Mounoubaï a passé sa jeunesse à Paoua où il a fait ses études primaires, a passé son certificat d’études.
Il s’est trouvé dans cette école en même temps que Patassé mais pas dans la même classe mais passe dans la même classe, Mounoubaï étant de trois ans et demi son aîné. Au début de l’année 1950, avant ses 17 ans, il part pour Bangui en espérant devenir infirmier. En fait, sa carrure, sa force physique et la réputation guerrière des Sara l’amenèrent à se diriger vers une carrière dans la police où il est recruté le 1er mai 1950 comme agent de 3ème classe stagiaire avant d’être titularisé le 1er mai 1951.
Il débute au commissariat central puis est affecté au commissariat du Km5. Il revient ensuite au centre et suite des stages de perfectionnement à école fédérale de police de Brazzaville, ce qui favorise son avancement. En décembre 1957, il devient assistant de sécurité publique, équivalent à brigadier de police. Il se trouve à Bangui le 1er Décembre 1958. Bien noté et de carrure impressionnante, il est affecté à la protection de Barthélémy Boganda.
Le destin fait qu’il ne peut l’accompagner à Berbérati le 29 mars 1959 à cause d’une panne de voiture qui l’empêchera de rejoindre l’avion qui s’écrasera dans la Lobaye. Après la mort de Boganda, il deviendra responsable de la sécurité de David Dacko. Il accède au grade d’officier de paix à titre exceptionnel en décembre 1960. Jusqu’en 1965, il porte le titre officiel d’attaché au cabinet du Président de la République. A cette époque, il part en stage de formation en Israël.
Le 9 août 1963 est créé la Brigade de Sécurité Intérieure de l’Etat (BSIE), rattachée directement à la Présidence de la République qui sera dirigée par Mounoubaï à son retour d’Israël. Il devient commissaire de police de 3e classe en août 1964.
En juillet 1965, Mounoubaï est cumulativement chef de la brigade de sécurité intérieure et responsable de près de 140 agents qui la compose. A ce titre, il exerce une surveillance sur les opposants possibles au gouvernement et prends position contre le colonel Bokassa. Le soir du 31 décembre 1965, Mounoubaï apprend qu’un coup d’Etat est en cours et passe sans se faire remarquer là la Présidence qui est déjà occupée.
Le commandant Bangui, chef du cabinet militaire lui a téléphoné pour lui dire que tous les deux étaient convoqués par Bokassa au camp militaire. Celui-ci leur demandant de venir assurer sa sécurité au camp de Roux car disait-il il se sentant menacé. Le fils de Mounoubaï raconte qu’il a reçu en l’absence de son père vers minuit un coup de téléphone de Bokassa lui-même lui demandant de le chercher "il faut absolument le trouver et lui dire de venir à l’état-major. Les militaires veulent me tuer et il n’y a que lui qui peut me sauve. Tu as compris ? "
Lors d’un rapide passage chez lui, après minuit, il charge sa deuxième femme Marie-Cécile Mbor (sa première femme est alors dans la sa famille dans l’Ouham) de quitter la maison avec ses huit enfants pour les mettre à l’abri. Lui-même va chercher refuge au Km5 et y reste caché 3 ou 4 jours avant de passer l’Oubangui vers le Zaïre. Il sera révoqué par Bokassa le 20 janvier 1966 et Bokassa mettra sa tête à prix promettant sur les ondes de la radio nationale 5 millions de FCFA pour sa capture. Dans la nuit du 23 janvier 1966, Mounoubaï est arrêté à Mongoumba. Le soir, Banza prend la tête d’un groupe de 60 soldats et se rend là-bas pour le chercher. Mounoubaï est menotté, ligoté, frappé et ramené au camp de Roux puis conduit au camp Kassaï où il mourra le 24 Janvier 1966.
Ses deux femmes, les enfants ainsi que les parents de sa deuxième épouse qui résidaient à Bangui sont arrêtés le lendemain du coup d’Etat puis relâchés après l’exécution mais ne peuvent quitter Bangui. C’est seulement huit mois plus tard lors d’une rencontre entre Bokassa et Tombalbaye, Président du Tchad que celui-ci obtient qu’ils puissent quitter la République centrafricaine vers le Tchad. Ils font l’objet d’un arrêté d’expulsion vers le Tchad.
Le 12 Août 1966, les épouses et les enfants de Mounoubaï quittent Bangui totalement dépouillés de tous leurs biens confisqués et de leurs comptes en banque. Après des années difficiles à Ndjamena, ils reviennent à Bangui en 1981. La situation de Jean-Prosper Mounoubaï est alors régularisée et ses droits à la retraite reconnus.
Dacko rend alors publiquement hommage à sa loyauté et à son dévouement et que l’existence d’un pseudo complot financé par l’armée populaire de Chine n’est qu’un mensonge monté de toutes pièces par Bokassa pour justifier le coup d’Etat de la Saint Sylvestre. L’un des fils Mounoubaï porte d’ailleurs le prénom David en hommage au Président Dacko et l’une de ses filles est la filleule de son épouse l'ancienne première Dame.
Thierry Simbi - 26 juillet 2017