Conférence de presse de Parfait Onanga-Anyanga, représentant spécial du secrétaire général des Nations-unies

Transcription intégrale

Propos introductifs

Chers amis, je me réjouis de me retrouver de nouveau parmi vous. Beaucoup d’entre vous sont des visages familiers. C’est avec un réel plaisir que j’ai l’opportunité de m’adresser à nouveau à vous. Je viens à vous dans un contexte qui reste quand même assez difficile. Je suis rentré d’un petit séjour à l’étranger et j’ai trouvé une presse locale, nationale, assez remontée contre la MINUSCA, l’accusant de toutes sortes de choses.

Il m’a paru important de venir, non pas pour m’expliquer mais pour clarifier un certain nombre de choses. Je dois dire qu’au fond, je suis venu pour une causerie, pour essayer de comprendre ce qui pourrait justifier une telle attitude à l’endroit de la MINUSCA. Je ne comprends pas que l’on puisse affirmer autant de non-vérités, autant d’accusations extrêmement graves contre la MINUSCA. Je me demande si on fait du travail de journaliste qui veut dire un travail de vérification, un travail qui est guidé par l’éthique en tout cas dans l’établissement des faits ou si on est plutôt motivé par des à priori politiques que l’on habille du semblant de la vérité.

Je suis donc extrêmement préoccupé. Lorsque je lis dans la presse que l’autorité de l’Etat est défiée, est mise à l’épreuve par la MINUSCA, à quel moment cela s’est-il passé ? Lorsque je lis dans la presse que la MINUSCA aurait extirpé des éléments de la Seleka, à quel moment cela s’est-il passé ? Lorsqu’on lit dans la presse des affirmations où l’on prétend que la MINUSCA ne fait pas un jeu clair, influence à tout point de vue le pouvoir en place, à quel moment cela s’est-il passé ? Que la MINUSCA aurait arrêté des fugitifs puis les aurait relaxés après plusieurs heures de détention et je note au passage sur la pression de la France ! Quels journalistes peuvent écrire de telles choses ? Où les ont-ils vérifiées ? Je crois donc sincèrement qu’il y a un besoin de rétablir la vérité et je crois qu’il y a un besoin de sérénité au niveau de la presse.

Je vous ai rencontré à plusieurs occasions où j’ai pu vous dire que vous avez un rôle extrêmement important dans l’effort de stabilisation et dans la consolidation de la paix dans ce pays. Or, ce que je lis m’inquiète profondément parce que l’outil presse peut contribuer à la paix ou peut être également un facteur de déstabilisation. Alors je me demande à quel moment les faits qui sont avancés ont fait l’objet de discussion ouverte avec la MINUSCA pour que les faits établis soient justement communiqués à la population nationale pour l’informer car c’est le devoir du journaliste.

Je vais vous décevoir car nos relations avec l’Etat centrafricain sont au beau-fixe. Nous travaillons étroitement avec les autorités centrafricaines et nous n’avons d’autre ambition que de soutenir les autorités légitimement élues. Nous avons une concertation régulière qui nous permet de faire le point sur les questions graves auxquelles le pays est confronté. Nous reconnaissons tous qu’il y a eu le 12 août un évènement que l’on peut considérer comme grave et que nous condamnons. Nous condamnons que des citoyens centrafricains, parce qu’il s’agit bien de cela, prennent sur eux-mêmes de tenter de s’extraire de la loi en quittant la capitale frauduleusement, en posant des actes violents au passage et en emportant avec eux des quantités d’armes qui sont absolument inacceptables.

Je veux confirmer que dès que l’information a été portée à la MINUSCA, nous avons depuis ce moment travaillé étroitement avec les autorités centrafricaines pour dans un premier temps faire la traque à ces fugitifs qui ont été rattrapés à 30 km de Sibut. Puis, des pourparlers ont été engagés avec eux pour les appeler à se désarmer. Au petit matin, un hélicoptère de la MINUSCA était venu en renfort. C’est à la suite de la présence de l’hélicoptère que certains de ces fugitifs ont jugé qu’il était bon pour eux de s’enfuir dans la forêt. Ceci peut être vérifié parce que 11 d’entre eux ont été appréhendés par la MINUSCA et ont été remis aux autorités centrafricaines. Deux sont encore en train de recevoir des soins. Neuf d’entre eux sont entre les mains des autorités centrafricaines.

Je me réjouis à cet effet de la communication importante faite par le ministre de la justice. Je le cite, "dans le cadre de ce mandat, la MINUSCA a stoppé leur progression". Ils ont été remis aux autorités centrafricaines et le ministre promet qu’ils seront traités comme tout Centrafricain poursuivi en justice. Hier soir, un communiqué du gouvernement a confirmé ces faits et a constaté qu’il y a encore de fugitifs et c’est vrai. Des opérations conjointes sont en cours, Gendarmerie nationale et MINUSCA, pour tenter de retrouver ces fugitifs. Il faut se féliciter que le Gouvernement ait lancé un appel et exhorté ces fugitifs à déposer les armes sans délai, à libérer les otages en leur possession, à signaler leur position ou à se rendre à la MINUSCA. Voici les faits établis.

Est-ce à dire que l’on n’aurait pas pu mieux faire pour éviter que ces individus sortent de Bangui ? Certainement. On aurait certainement pu mieux faire. Des dispositions sont en place et le chef de l’Etat a exigé qu’il y ait une coordination plus forte entre la MINUSCA et les autorités centrafricaines. Des mécanismes sont en train d’être mis en place. Je veux, de grâce, demander à la communauté nationale de sortir de la tête toute notion selon laquelle la MINUSCA aurait un agenda qui serait contraire à celui des autorités centrafricaines. Apprécions le travail que nous faisons. Ce travail est extrêmement difficile. Il n’y a nullement dans l’intention de la MINUSCA, ni les autorités en place qui sont nouvelles, qui ont à peine 4 mois, dans un pays où il y a encore des franges de l’autorité de l’Etat qui échappe encore à son contrôle. Nous le reconnaissons tous, il n’y a pas d’ambiguïté là-dessus. Entre ce fait qui est établi et la difficulté qu’il y a de mettre en place un mandat même le plus robuste qui soit, qu’il y ait des insuffisances, on peut le comprendre dans un contexte qui n’est pas simple. D’où vient-il qu’il a un agenda ? D’où vient-il qu’il y a une connivence ? Je ne comprends pas cette théorie de la conspiration. Qui gagne à avoir une MINUSCA amoindrie dans ce pays ? Qu’est-ce que vous avez à la place ? Que voulez-vous donner à ce nouveau gouvernement ? Quelle capacité voulez-vous lui donner ?

Je pose ces questions parce que je crois qu’il y a véritablement une campagne qui vise ce Gouvernement et qui est absolument injuste et déplacée. Aussi bien le Gouvernement que la MINUSCA font un travail qui n’est pas simple. Qu’a fait le Chef de l’Etat ? Vous le savez mieux que moi. Nous appuyons sa politique de la main tendue parce que nous savons tous qu’il n’y aura pas de solution militaire au problème de la Centrafrique. A moins qu’il y ait une solution magique dont certains disposeraient. Qu’ils soient alors patriotes et qu’ils donnent cette solution aux autorités nationales et que les problèmes du Centrafrique soient réglés d’un coup de baguette magique. Qui a cette solution aujourd’hui en Centrafrique ? Alors prenons l’opportunité d’avoir une force des Nations Unies, c’est l’expression de la solidarité internationale, c’est un sacrifice qui est fait par des pays et par des institutions. Des soldats sont morts en terre centrafricaine, ils sont versés leur sang loin de leur pays et ils font un travail qui n’est pas facile.

Je suis le premier à dénoncer les insuffisances des forces de Nations Unies lorsque cela est avéré. Nous menons une lutte acharnée pour s’assurer que nos troupes exercent leur métier dans le strict respect des standards onusiens et avec le plus grand professionnalisme. Nous renvoyons des troupes quotidiennement chez elles lorsqu’elles n’adhèrent pas aux principes des Nations Unies que ce soit dans le cas des abus sexuels ou des comportements liés aux missions qui leur sont confiées. Il n’y a aucune forme d’indulgence dans cette mission. Nous le disons et le faisons de façon transparente.

A quel moment avons-nous eu une attitude qui consistait à protéger les voyous dans ce pays ? Alors nous avons un nouveau mandat et il faut nous laisser le temps de le dérouler. Nous venons d’accomplir ce qui était impossible dans ce pays : Organiser des élections qui ont produit un gouvernement légitime et un président élu. Déjà, l’impatience s’installe alors qu’il n’a que 4 mois et n’a pas encore les moyens de son action. Des efforts sont en train d’être faits pour aller à Bruxelles pour parler aux partenaires. Une réunion du GIC aura lieu à partir de demain pour faire le point sur ce qui s’est fait. Ça a pris des décennies pour détruire. Donnons du temps à ce Gouvernement pour qu’il se fasse, pour qu’il mène les réformes de fond qui vont permettre au pays de se redresser et de consolider les acquis.

Et ce qui a été fait par la volonté de la Communauté internationale en établissant la mission des Nations Unies, qui a été soutenu en son temps et qui continue de l’être d’ailleurs par la force Sangaris. Nous avons ensemble accompli un travail qu’il faut reconnaitre. C’est un travail extraordinaire, qui est difficile. Je ne mentionnerais pas le nom de cette autorité qui disait que si nous avons réussi à organiser des élections dans ce pays, nous pouvons organiser des élections en enfer. C’est une autorité centrafricaine qui nous l’a dit. Elle se reconnaitra. C’est une appréciation de ce que l’on peut faire ensemble seulement si nous le faisons ensemble. Est-ce à dire que tous les problèmes du pays sont réglés ? Je suis le premier à reconnaitre que ce n’est pas le cas. Nous devons travaillons ensemble et si nous avons des insuffisances, nous devons venir à bout de ces insuffisances ensemble. Certains préfèrent peut-être continuer à mener la campagne. Mais je dois dire que la campagne politique est passée, les élections sont passées. Nous sommes dans le temps de la gouvernance. Avec ce gouvernement, aussi importantes que soient les attentes, aussi impatientes que soient les populations, tout ce qui doit se faire et je l’avais déjà dit en d’autres temps, va se faire avec la sueur et les larmes. Cela va demander de l’abnégation et du courage pour aller de l’avant.

Chers amis, je crois qu’il est important de la part de la presse, je suis absolument transparent et je veux que la presse joue son rôle qui est d’informer. Prenez la peine de rechercher les faits et surtout évitons les raccourcis et les accusations trop rapides. Certaines d’entre elles sont mensongères, peuvent entrainer des incompréhensions et compliquer la tâche que nous menons tous ensemble ici.

Nous avons une responsabilité. Les médias ont une responsabilité. Le gouvernement a une responsabilité. Je crois que nous devons tous ensemble nous serrer les coudes pour arriver à faire ce qui est encore à faire dans ce pays. Qu’est ce qui reste à faire ? Le Chef de l’Etat a lancé une approche que nous soutenons, celle d’un désarmement inclusif. Des invitations ont été lancées. Le travail qui est en train d’être fait visera à séparer le bon grain de l’ivraie. Lorsque nous aurons réussi à établir qu’il y a des groupes qui préfèrent ne pas entrer dans l’ordre constitutionnel établi par les centrafricains eux-mêmes au sortir de ces élections, il n’y aura pas d’alternative à l’approche proposée par le gouvernement et par le chef de l’Etat. Il n’y a pas d’alternative, il faut rentrer dans cette conversation. J’ai des collègues du désarmement qui travaillent étroitement avec le ministre Sako. Ce n’est pas un travail facile. Certains pensent qu’il faut chercher des solutions qui sortiraient de l’arrangement constitutionnel en attribuant à qui un poste, à qui autre chose pour les compensations, pour accepter le processus proposé par le Chef de l’Etat. Nous ne pensons pas que ce soit une bonne idée. Il faut accepter la main tendue du Président de la République, il faut aller dans le dialogue, mais du dialogue dans le cadre du DDR mais pas pour renégocier un quelconque arrangement politique qui a été sanctionné par les Centrafricains à travers le vote de la nouvelle constitution, et à travers l’avènement des nouvelles autorités.

Qu’on leur donne du temps. Je dis toujours que ce qui me parait vraiment extraordinaire, c’est la volonté de tirer vers le bas les autorités à chaque fois qu’il y a une opportunité.

Alors, c’est un droit de réponse. Je crois que c’est un droit de réponse. Je suis à la tête d’une organisation qui est basée sur les principes. Qu’il y ait deux individus dont l’action n’est pas conforme aux normes onusiennes, pour qu’on ternisse l’image de toute une organisation qui est venue dans ce pays à la demande des centrafricains pour aider les centrafricains. Il va sans dire que c’est une organisation qui n’est pas la première et ce n’est pas la première mission de paix dans le monde et les missions de paix arrivent souvent dans les pays qui sont divisés, qui sont en difficulté. Il va sans dire que nous venons avec des moyens qui parfois n’existent pas dans le pays. C’est vrai on voit beaucoup de voitures, mais il faut bien que les gens qui ont des voitures circulent, pour faire leur travail. Alors parfois on fouille ces voitures parce que il y a de la suspicion, parfois on fouille l’ambulance, on le soupçonne de porter des armes. Une fois que les enquêtes sont menées, on se rend compte qu’il n’y a pas d’armes dans les voitures. Dans le même temps, on est en train d’entraver l’action de la Mission parce que la confiance n’existe pas.

Au tout début, il y a à peu près deux ou trois mois, 18 containers de la MINUSCA ont été stoppés avec les mêmes allégations que nous avions des armes. Mais pour qui amènerions nous  les armes ici si ce n’est pour le gouvernement ? D’où vient-il qu’on peut soupçonner une institution comme celle-ci d’avoir un projet qui soit contraire à celui des autorités établies. Je crois qu’il est bon qu’on se dise la vérité. Cela n’est pas précisément le type de message qui serait de nature à faciliter l’énorme travail qui reste encore à faire dans ce pays, qui est consolider la paix et la stabilité. J’ai eu hier matin pendant deux heures et demi une rencontre avec les acteurs de la société civile. Cette rencontre m’a permis de voir encore une fois à quel point ce pays a besoin de dialoguer, parce que malheureusement, il y a une tentation de voir la vie de façon manichéenne. C’est blond ou c’est noir ! Non, il y a du gris quelque part. Les choses ne sont pas si tranchés, il y a un besoin de se parler, il y a un besoin de parvenir à des solutions qui permettent à ce pays d’avancer. Et je dirais ceci pour finir. Le pays est à la croisée des chemins. Le pays vient de traverser une phase qui n’a pas été simple. Nous avons tous réussi ce virage de la transition. Des élections ont été organisées, le président a été élu à l’envi de beaucoup de pays. Les autorités sont en place. Cela, le gouvernement, le chef de l’Etat le dit, quand on sort de Bangui les populations me le disent, n’a été possible que parce qu’il y a eu la solidarité internationale au-delà de la MINUSCA. Je dis bien la solidarité internationale, c’est un geste fort. Le monde a les yeux sur la Centrafrique, il faut s’en féliciter parce qu’il y a beaucoup d’autres crises à travers le monde, et je ne suis pas sûr que cette fenêtre d’opportunités puisse durer s’il n’y a pas la nécessaire compréhension entre vous et nous, s’il n’y a pas l’harmonie, qui permettra de faire des avancées vers plus de paix et de stabilité.

Nous avons proposé et nous sommes en train de travailler avec les autorités et c’est cela qui est responsable. Nous sommes en train de travailler y compris de faire face aux difficultés auxquelles le pays est encore confronté. La nouvelle résolution du Conseil de Sécurité est claire sur le fait que l’objectif stratégique de cette mission va être désormais de réduire la présence des groupes armés dans le pays. C’est une réponse qui est multiforme, ce n’est pas une réponse qui est seulement militaire. Intéressons-nous aux questions de maintien de la paix. Nulle part dans le monde on a procédé à un désarmement force. Nulle part. Cela n’a jamais eu lieu. Le désarmement est avant tout un exercice qui doit exprimer le consensus national pour passer de l’autre côté, la volonté de vivre ensemble, avant même peut être la réconciliation comme le soulignait un collègue ce matin, avant même de faire la réconciliation, simplement de la tolérance.

Nous sommes contraints de vivre ensemble. Malheureusement je dois le dire, quand on dit ces choses, certains l’interprètent comme de la faiblesse, certains l’interprètent comme faisant simplement le jeu de certaines forces négatives dans le pays. Mais non ! Le président a raison et il faut le soutenir dans son effort. Il faut faire en sorte que ces compatriotes de Centrafrique qui semblent encore ne pas avoir compris que le vent a tourné, qu’il y a une vraie transition dans laquelle le pays est engagé, que la MINUSCA soutien et que les forces internationales et la communauté internationale soutiennent. Ceux qui ne l’ont pas encore compris, sont précisément ceux vers qui nous devons aller pour faire en sorte qu’en faisant cet effort de séparer le bon grain de l’ivraie qu’on finisse par appliquer la force lorsque cela sera nécessaire. Cela sera fait et le mandat qui est donné à la MINUSCA visera précisément à obtenir ces résultats. Ces résultats seront obtenus dans le temps. J’en ai l’intime conviction.

Je pensais qu’il était bon que nous ayons cette conversation. Je tiens en tout cas à vous rassurer sur le fait que la relation de la MINUSCA et du gouvernement centrafricain est au beau fixe. Cela peut évidemment ne pas plaire à certains. Je vois mal comment est-ce qu’on pourrait espérer faire avancer la cause de la paix dans ce pays si à chaque fois qu’il y a un malentendu on attise la division entre une force internationale qui est l’expression de la solidarité internationale dans le pays et le Gouvernement. Aujourd’hui voilà c’est ma déclaration. Je vais décevoir ceux qui pensent qu’il peut y avoir des malentendus entre nous. Mais ceux-là sont réglés parce que nous avons le même objectif stratégique. Voilà chers amis et navré d’avoir été si long.

Questions/Réponses

Bonaventure Ngomba-Katikkiro - Radio Ndeke Luka : Bonjour à tous. Nous remercions le Secrétaire Général des Nations Unies pour ces propos préliminaires. Nous demanderons au Représentant de ne pas adopter une attitude qui paraît un peu remontée contre la presse juste pour garder la confiance dans les échanges.

La première préoccupation. Lorsque vous parlez insuffisance vous le reconnaissez bien, insuffisance du côté du gouvernement mais aussi insuffisance du côté de la MINUSCA. Mais, ces insuffisances, on peut déjà dire que du côté du gouvernement, de l’Etat centrafricain, il n’a pas de force, une force armée pour défendre le pays, assurer la sécurité dans le pays surtout au niveau des frontières ce qui fait que les hommes armés circulent comme bon leur semble. Alors puisque l’Etat n’a pas de force, il dépend seulement de la MINUSCA pour l’instant pour la sécurité du pays et la sécurité urbaine avec la gendarmerie et la police. Mais, si l’Etat n’a pas de force armée et qu’il dépend de la MINUSCA, et qu’avec la MINUSCA il y a des éléments armés qui traversent les frontières par ci par là, qui font des mouvements internes comme ils veulent sans être inquiétés, mais vers qui on doit se tourner pour poser une question par rapport à ces insuffisances-là ?

Et deuxième souci, on vient d’apprendre du côté de Ngakobo vers Bambari dans la Ouaka qu’à l’occasion d’une distribution de vivres a des déplacés par l’ONG Triangle, le contingent mauritanien de la MINUSCA aurait amené, aurait facilité, à certains éléments de l’ex-Seleka qui sont venus tuer quelqu’un parmi ces personnes déplacées. Le corps de la personne tuée a été trimbalé de ce camp à la gendarmerie et la Gendarmerie a dit non, on n’a pas tué ce corps-là, donc il faut quitter les lieux. Ils ont quitté les lieux et le corps est resté jusqu’au lendemain. Le contingent mauritanien est venu récupérer le corps et le ramener à leur base. Finalement, aujourd’hui, la population est en train de préparer une marche pour une protestation donc est ce que là il n’y a pas la responsabilité de la MINUSCA à travers son contingent qui doit assurer la sécurité dans cette localité ?

Et pour terminer, pourquoi, avec l’arrestation très récente des leaders de l’ex-Seleka, pourquoi on a préféré garder leurs identités secrètes, alors que pour certaines responsables, certaines autorités arrêtées par la MINUSCA, je donne en exemple Francis Bozize, son identité n’a pas été cachée par la MINUSCA. Pourquoi la MINUSCA traite différemment certaines personnes arrêtées différemment par rapport à d’autres. Est- ce que c’est parce que la MINUSCA n’a pas confiance au peuple centrafricain ou que la MINUSCA n’a pas confiance aux autorités centrafricaines parce que si on donne leurs identités on va les exposer ? Est-ce que c’est ça le problème ?

RSSG : Merci beaucoup. Puisque qu’il y a eu trois questions en une, je crois qu’il est bon que je réagisse assez rapidement.

D’abord, une clarification, je crois que ce n’est pas la première fois qu’on se rencontre, je suis plutôt passionné dans mon expression mais il n’en est rien. En tout cas je ne suis pas remonté contre la presse même si je dois reconnaître que je suis parfois abasourdi par ce que je lis. Là-dessus, il faut absolument le clarifier et vous me retrouverez encore dans une expression passionnée parce que tout ce que je fais, je le fais avec passion et ceci explique cela.

Je suis d’accord avec vous. L’état actuel des Forces centrafricaines de sécurité intérieures et de défense ne permet pas au pays précisément d’assurer toutes ses responsabilités, je dis bien toutes ses responsabilités. Ceci dit l’Etat n’a pas abdiqué. L’Etat reste notre partenaire stratégique le premier. Nous sommes le partenaire stratégique de l’Etat. Je le dis et le redis, nous sommes ici en appui aux autorités centrafricaines. Voilà pourquoi j’ai demandé à tous mes collègues, ceux de la Force mais aussi ceux de la police, je leur ai dit de prendre les instructions, pas des instructions, mais en tout cas disons de répondre aux appels de toutes les autorités sans filtre. Je n’ai même pas besoin qu’on me consulte parce que nous sommes ici pour servir le gouvernement centrafricain. Aujourd’hui, nous travaillons en colocation dans des activités de police avec des centrafricains et demain j’en suis convaincu avec des éléments des forces de défense centrafricaines. Nous travaillerons ensemble. Je le souligne pour encore une fois dire que nous avons une responsabilité d’accompagner les autorités centrafricaines, mais les autorités centrafricaines restent souveraines dans leur pays et continuent d’ailleurs vous le voyez à travers la ville toutes les fois qu’elle a la capacité de la Force en dehors de Bangui. Nous sommes aujourd’hui en train de travailler pour renforcer ces capacités avec EUTM et d’autres partenaires, mais aussi pour ce qui concerne les forces de sécurité intérieures avec la MINUSCA et d’autres partenaires. L’état centrafricain reste l’autorité qui a la responsabilité première de la paix et de la sécurité sur le territoire centrafricain. Nous sommes ici en appui et nous le faisons avec l’ensemble de nos moyens mais aussi dois-je le reconnaitre avec certaines des limites qui sont encore les nôtres. Mais il ne faut pas douter sur la détermination et la volonté de la MINUSCA de travailler avec les autorités centrafricaines pour faire en sorte qu’on vienne à bout de toutes les difficultés que vous avez mentionné. Vous savez quand on a un pays aussi grand que la RCA, et pour vous donner une image, le General Keita, le commandant de la Force, en tant que chef des Forces sénégalaises, un pays qui est trois ou quatre fois plus petit que la Centrafrique, avait quatre fois plus d’éléments que la MINUSCA. Nous connaissons la nature poreuse des frontières de nos pays. Ce n’est pas un fait qui affecte seulement la Centrafrique. C’est pourquoi je continue de dire deux choses.

La première c’est que c’est une tâche immense et qui n’est pas simple. La deuxième c’est que tous les problèmes de la Centrafrique ne se règleront pas par une expression de la Force. La Force des cœurs, la Force du vouloir vivre ensemble, la volonté des Centrafricains de tourner la page. Je me rappelle cette phrase du chef de l’Etat qui disait que si vous voulez faire le désarmement c’est aujourd’hui. On peut le faire aujourd’hui. Ça veut dire que la Force est présente pour créer les conditions minimales de sécurisation de l’Etat et des institutions, de protection des populations pour éviter qu’il y ait des violences criminelles, des violences de masse et donc profiter de la présence de la MINUSCA dans ce contexte là pour que se fasse l’effort national que nous ne pouvons pas faire. Nous ne saurons jamais remplacer les Centrafricains. Il n’y aura pas de solutions forcées, de solutions violentes en Centrafrique. Qu’on le veuille ou pas l’expression de la Force sera la lorsqu’on aura identifié tous ceux qui ne veulent pas rentrer dans le processus de désarmement souhaité par le Président. Nous allons traiter cette catégorie. Il faudrait la traiter et là l’usage de la Force évidement lorsqu’il s’imposera sera sur la table. Mais nous voulons sortir de l’âge de fer, nous voulons sortir du cercle vicieux de la violence qui n’en finit pas dans ce pays. Comment le feriez-vous en écrasant tous ceux qui sont contre vous ? Je pose une question. Qui le fera ? Est-ce que la solution c’est la guerre pour écraser l’autre, pour régner seul ? Je ne pense pas que ce soit une solution.

Le chef de l’Etat l’a dit encore une fois même dans le contexte de l’armée qu’il va rétablir. Il n’envisage pas de réformer son armée pour la lancer en guerre contre une partie de la Centrafrique. Je fais écho à l’appel lancé par les autorités et qui très claire. Le gouvernement exhorte à déposer les armes sans délai, à libérer les otages. Il lance le même appelle à tous ceux qui continuent aujourd’hui de faire obstacle à l’autorité de l’Etat. Ce même appel a été lancé par le Conseil de Sécurité, qui a demandé que ces groupes déposent les armes inconditionnellement et embrasse le DDR proposé par le chef de l’Etat. Donc ses conversations vont se faire, mais je dois dire que le DDR n’est qu’un petit moyen, essentiel mais ce n’est qu’un moyen. Alors il faut qu’on continue à faire en sorte qu’il y ait la seule chose qui va permettre la pérennité des actions pour la paix. Ça va être de s’accepter et de savoir qu’il n’y aura pas d’autres options que de vivre ensemble dans le respect de l’ordre constitutionnel, dans le respect de l’autorité de l’Etat, dans le respect de l’état de droit et cela c’est notre responsabilité, c’est notre rôle renforcer la main de l’Etat pour que l’autorité régalienne de l’Etat s’impose sur tout le territoire du pays. Et c’est un exercice qui n’est pas simple, mais c’est la détermination des uns et des autres, c’est le sens de la présence de l’EUTM ici, c’est le sens de la présence de la MINUSCA, c’est le sens de toutes les actions qui sont en train d’être menées pour arriver à cet objectif, qui va être un objectif lent mais ou la détermination ne devrait être jamais remise en cause. Entre temps vous avez raison, dans le cas de des évènements de Ngakombo, ce qui s’est passé c’est malheureux. L’assassinat de cette personne est là aussi l’expression des violences inter communautaires qui sont parties de quoi ? Est-ce que vous connaissez les faits? Trois bœufs ont été volés, une mission a été lancée en tuant le propriétaire des bœufs, et puis mission de la partie opposée a été lancée justement pour récupérer les trois bœufs volés, et dans cet échange une personne est morte. Au moment où je vous parle l’individu qui a commis le crime initial a été arrêté par la MINSUCA. Elle est entre les mains de la gendarmerie c’est ce que vous n’avez pas mentionné.

Nous avons aujourd’hui mis le camp dans des conditions décentes parce que toute personne a le droit à un traitement décent y compris dans la mort. Nous sommes en train de créer les conditions pour que les parents de ces personnes puissent récupérer ce corps. Mais celui qui a commis l’acte initial a été arrêté par la MINUSCA et a été remis à la gendarmerie pour qu’il réponde de son forfait.

Il y a eu la question sur l’identité des arrêtés. Le gouvernement est au courant de toutes les personnes qui ont été arrêtés puisque ses personnes sont entre les mains du gouvernement, entre les mains des autorités centrafricaines. Je vous ai lu les remarques du ministre de la Justice là-dessus et que je soutiens encore une fois. Il dit très bien que nous sommes ici engagés dans la lutte contre l’impunité et que dans le cadre d’une justice indépendante, ces personnes arrêtées feront l’objet de procès en bonne et due forme et auront le droit à une défense.

Donc, il n’est nullement dans l’intention de la MINUSCA d’exposer tel ou tel Centrafricain. Loin s’en faut. Je crois que c’était bon de clarifier cela. Je crois qu’il faut faire confiance à vos autorités. Les propos qui ont été précisé pour traiter l’un ou l’autre cas me paraissent absolument respectables. Il faut faire confiance en vos autorités sur leur volonté, leur détermination de faire en sorte que toute la justice soit rendue et que la lutte contre l’impunité devient une réalité.

Guy-Vincent Masseroang – Njoni Sango : Vous nous avez dit tout à l’heure que les relations entre la MINUSCA et le gouvernement sont au beau fixe. Je voudrais savoir quels sont vos réactions, ou bien que dites-vous par rapport à l’indignation de certaines autorités du pays par rapport à l’évasion des éléments de la Seleka sur la route de Sibut parmi lequel on peut citer l’intervention du Premier ministre, du ministre de la Sécurité publique et de certains leaders politiques ?

La deuxième question. Qu’est-ce que le ministère de la Justice vous a dit à propos d’Haroun Gaye, Abdoullaye Hissene et Tidjani, ces leaders Seleka qui font l’objet de mandat d’arrêt par rapport à leur évasion. Et vous avez dit dans les mois passés dans cette salle que la MINUSCA ne permettra pas qu’un groupe armé puisse marcher sur Bangui pour déstabiliser le pouvoir. Avec l’organisation des Seleka qui se passe présentement dans la province, est ce que nous ne pourrions pas un jour à l’autre assistera à une éventuelle entrée de ce mouvement pour déstabiliser le pouvoir en place ou soit à une partition du pays?

RSSG : Je voudrais dire que vous avez raison de rappeler ce commentaire que j’avais fait il y a quelque mois et que je reconfirme. Je comprends les appréhensions et les peurs, mais je peux simplement vous répondre en disant que si cela se passait nous aurions failli à notre tâche et cela serait lamentable. Donc je réaffirme que cela n’aura pas lieu. Il n’y aura pas une marche d’un groupe armé sur Bangui pendant que la MINUSCA est présente. Je tiens à vous rassurer par rapport à cela.

Et sur la discordance qui a pu avoir ici et là dans l’appréciation des évènements de Sibut, je le comprends. Même entre nous, ici à la MINUSCA, nous nous posons les mêmes questions. J’ai demandé à mes équipes d’établir les faits pour que l’on ait une chronologie des faits, tel que je vous l’ai énoncé au début de mes propos. Je sais qu’aujourd’hui il y a encore des fugitifs et qu’il y a une action concertée de la MINUSCA et de toute défense internationale. D’ailleurs nous avons l’appui de Sangaris à cet effet et des autorités centrafricaines pour qu’on puisse mettre la main sur ces individus. Et mieux encore, je crois que le gouvernement a été clair et j’apprécie hautement l’acte responsable des autorités centrafricaines qui ont justement lancée un appel à ses fugitifs pour qu’ils se rendent. Ce serait une expression d’un encourage et cela permettrait d’éviter qu’il y est malheureusement une escalade de ce qui pourrait entrainer le pays vers plus d’instabilité.

Il faut mettre fin à cela assez rapidement et dans tous les cas j’ai bon espoir que ses fugitifs seront arrêtés et qu’ils devront répondre de leur forfait comme ceux d’entre eux qui sont les mains des autorités centrafricaines. Nous constatons effectivement qu’ils ne font pas partie des onze qui ont été arrêtés. Donc l’effort qui est en cours vise précisément à mettre la main sur tous ceux qui aujourd’hui sont encore au large. Une fois que nos efforts aboutiront, je reste confiant que la justice suivra son cours.

Junot Séraphin Gokouzou - Tribune d’Infos: Par ce préalable je voudrais commencer mon intervention pour vous dire que lorsqu’à l’issu d’un court séjour à l’étranger vous trouvez une presse nationale remontée contre la MINUSCA, je vous dis, non Monsieur le Représentant spécial. La presse n’est pas remontée contre la MINUSCA, plutôt cette presse ne fait que révéler le ras le bol d’une frange de la population qui est remontée contre la MINUSCA. A un moment donné, la société civile a même envisagé des actions d’envergure sous forme de marche de protestation contre la MINUSCA. Heureusement la sagesse a guidé les uns et les autres pour que l’on n’en arrive pas là. Donc, du coup, on n’est dans une trilogie où il y a la MINUSCA, la presse et la population. Vous n’êtes pas sans ignorer que les urgences sécuritaires et humanitaires font partie des priorités à la fois par les autorités centrafricaines légitimement établies et de la MINUSCA qui se dit partenaire stratégique des autorités nationales.

Ce que la population ne comprend pas c’est le fait que malgré les mesures quotidiennes de prévention, malgré les escortes de la force de la MINUSCA, les patrouilles de la police en colocation avec les policiers centrafricains,  il y a toujours des choses qui se trament et qui sèment la désolation. Ça se passe sous la barbe des contingents qui sont déployés dans le pays selon la carte graphique que l’on a visionné tout à l’heure. C’est cette incompréhension la qui s’exprime. Dès lors qu’il y a des signes avant-coureurs, la presse ne fait que son travail de relais. Alors, par rapport au nouveau mandat qui selon vous prévoit qu’il faut réduire la présence des forces négatives dans le pays, pouvez-vous dire avec la bouche la plus autorisée, de quelle manière cette réduction de ces forces devrait se faire surtout que vous avez l’appui de Sangaris ?

Maintenant vous parlez également des résultats qui doivent se faire dans le temps. Y a-t-il un chronogramme à l’appui ? Si non, pourquoi ? Je terminerai par la question qui engage votre responsabilité. De par vos relations avec les hautes autorités du pays nouvellement établies, qu’est-ce que vous avez préconisé en plus de votre mission, en tant que stratégie politique qui puisse aider ses nouvelles autorités à se tirer d’affaire avant le rendez-vous de Bruxelles ?

RSSG : Merci beaucoup pour ces questions importantes. La clarification de départ était également utile. Voilà encore une fois pourquoi j’insiste sur le rôle des médias. Je crois qu’on peut comprendre que la population s’exprime des frustrations, mais le rôle du journaliste est de vérifier l’information. Ce n’est pas par ce que la population dit des choses que la presse doit nécessairement les rapporter comme s’il s’agissait de faits établis. On peut rapporter les préoccupations des populations et dans une analyse journalistique nuancer les propos ou établir le propos lorsqu’ il est avéré. Je vous dis encore une fois l’organisation que je représente n’a pas peur de la vérité, nous n’avons pas peur de la transparence et je suis le premier à la promouvoir.

Voilà pourquoi j’ai demandé à mes collègues ici de nous organiser pour que vous ayez un droit de réponse, y compris à Guira FM. Je l’ai dit hier aux organisations de la société civile qu’elles doivent utiliser les médias des Nations Unies, de venir chez nous pour dire ce qu’elles pensent de nous même si elles ne sont pas d’accord avec ce que nous pensons. Ce serait une aberration que les Nations Unies deviennent une organisation qui censure les informations. Sur ce plan là, je veux vous rassurer sur les intentions de l’organisation. Par rapport à l’accès sur la vérification de l’information, Vladimir Monteiro est la porte d’entrée, c’est notre porte-parole. C’est lui qui est la personne la plus autorisée pour vous renseigner, toutes les fois qu’il y aurait des doutes sur les informations ou sur ce qui affecte le travail de la MINUSCA.

Vous avez fait référence au mandant de la MINUSCA qui ne dit pas la manière par laquelle cet objectif peut être atteint. Si vous relisez la résolution, vous verrez qu’elle accorde une place essentielle à la nécessité d’un consensus national dans la résolution des problèmes auxquels la Centrafrique est confrontée. D’ailleurs, j’ai entendu quelque part que certains ont pensé que l’appel au dialogue inclusif auquel le Conseil de sécurité fait allusion, imposerait au Gouvernement un dialogue avec les groupes armés pour leur donner des postes, pour un partage du pouvoir. Il n’en est rien. Le Chef de l’Etat était clair là-dessus et le Conseil de sécurité ne permettra jamais d’accorder une parcelle d’autorité à des forces qui seraient illégitimes.

Nous ne pouvons quand même pas avoir soutenu un processus électoral si difficile, aider véritablement à l’expression de la volonté souveraine du peuple centrafricain, et nous retrouver ici à négocier des espèces d’arrangements de dessous de table pour octroyer quelques parts de pouvoir à quelques groupes armés que ce soit. C’est incohérent et ce n’est pas l’approche qui est la nôtre.

Le dialogue dont il est question ici, c’est de dire que ce pays a connu un conflit qui a provoqué la mort de milliers des personnes. Un million de personnes aujourd’hui sont soit sur les routes de l’errance en dehors du pays, soit dans des sites de déplacés à l’intérieur du pays. Un million de personnes, c’est énorme. Ce que le Conseil de sécurité établit, c’est qu’autant on a fait des progrès, autant le pays reste fragile. Dans cette fragilité où il y a une présence encore absolument forte de groupes armés de toute sorte, et même parfois de communautés armés, il a un besoin urgent de faire en sorte que tout soit fait pour réduire justement ce niveau de violence pour que puissent commencer les activités de développement pour ne pas parler de l’urgence humanitaire qui affecte encore le pays. Pour le faire, il faut que ceux qui ont pris les armes hier, conformément aux discussions qui ont eu lieu dans ce pays au Forum de Bangui, aux discussions de Brazzaville, conformément aux engagements pris, qu’un processus de désarmement, de démobilisation, de réintégration et de rapatriement, que tout cela soit mis en place de manière inclusive. Voilà pourquoi, les autorités de votre pays et le chef de l’Etat en premier, a jugé utile d’établir ce mécanisme au sein de la Présidence pour lui donner tout le poids de sa fonction en demandant aux uns et aux autres de venir autour de la table.

Dans l’ensemble, je dois dire que la majorité des acteurs sont plutôt ouverts à ce processus qui va s’articuler autour de tous les efforts pour la Réforme du secteur de la sécurité. Je sais qu’il y a actuellement des discussions importantes pour qu’un plan de la sécurité nationale soit établi. Toutes ces pièces mises bout à bout vont permettre de créer des conditions de désarmement volontaire. Que les Centrafricains acceptent que le temps de la guerre soit passé et que c’est le temps de la reconstruction et de la stabilisation du pays.

C’est dans ce contexte la que le Chef de l’Etat se propose d’emmener la nation centrafricaine à Bruxelles avec ses partenaires pour que ces discussions stratégiques se fassent et qu’on apprécie les efforts que le gouvernement a faits pour susciter ce processus de désarmement à l’échelle nationale.

Je veux saisir cette occasion pour lancer un appel à tous ceux qui seraient réfractaires à ce processus. Il n’y a aucune justification aujourd’hui au statu quo. Les élections sont passées. Nous nous félicitons du retour à l’ordre constitutionnel dans votre pays. Ce n’est pas rien que l’autorité de l’état s’établisse. Vous me direz que fait un appel ? Le Conseil de sécurité l’a fait, le Chef de l’Etat l’a fait. Nous allons poursuivre cet effort et demain lors du GIC, la Communauté régionale et internationale viendra renforcer ce même message en disant qu’il n’y a pas d’alternative à l’ordre constitutionnel rétabli pas les centrafricains.

Tous ceux qui n’entreront pas dans la moule, s’inscriront en hors la loi que beaucoup d’entre eux sont déjà. Il n’y aura pas d’autre choix que progressivement, de dérouler l’autorité de l’Etat et de repousser le plus loin possible jusqu’à les réduire tous ceux qui ne rentrent pas dans l’ordre républicain qui est en train de se mettre en place. Le seul espace, c’est le dialogue. La seule concession c’est le dialogue. Qu’ils viennent s’assoir afin que soit discuté les conditions de leur réintégration, de leur démobilisation. Lorsque l’on pourra cantonner ceux qui seront désarmés et réinsertion, lorsque l’on trouvera les moyens. Aujourd’hui la Banque mondiale et la Communauté internationale dans son ensemble, la Banque africaine de développement, sont prêtes à mobiliser des ressources que l’on puisse organiser ce DDR, qui n’est pas un échange de la paix contre l’argent. Non.

Le DDR doit d’abord être une expression de la volonté des Centrafricains de mettre une croix sur la violence et doit être l’expression de leur volonté de vivre ensemble. Tout le reste vient en appui. La force, et la Résolution le dit, pourrait être utilisée pour contraindre ceux qui n’acceptent pas le processus de désarmement. Des dispositions sont en train d’être mises en place pour que cette recommandation, cette instruction du Conseil de sécurité soit mise en place le moment venu. Mais ce n’est pas le début. On ne commence pas un désarment par la violence. C’est antinomique. Ce travail va se faire. Il exige ce leadership national qui est en place, ce processus inclusif qui est en train d’être mis en place. A côté de cela, tout ce que nous faisons dans la mission doit concourir au même objectif. On arriverait plus rapidement à nos fins si on le faisait ensemble et avec la population que j’ai vues faire de longues queues pour aller aux élections, bravant tous les défis et désireuse d’une transition pacifique.

Quand j’étais à Kaga-Bandoro avec le Chef de l’Etat, ce que j’y ai vu, était émouvant. Toutes les populations centrafricaines dans leur diversité et dans leur beauté qui embrassaient le Chef de l’Etat. Je n’ai pas vu à cet instant, une division ou la présence d’un groupe armé qui empêchait à ces populations de venir exprimer au Chef de l’Etat leur adhésion à son action. Je crois que c’est cela la voix et il y a une dimension régionale qui est importante. Ce travail est à pied d’œuvre. Voilà pourquoi le travail de l’Union africaine, de la CEEAC, les efforts bilatéraux du chef de l’Etat avec ses voisins immédiats, tout cela va concourir à créer les conditions, la masse critique qui permettra d’isoler ceux qui ne veulent pas rentrer dans l’ordre constitutionnel établi par la Centrafrique.

Cela peut paraitre extrêmement lent. Un calendrier précis est difficile. Ce qui serait souhaitable pour le pays, c’est qu’avant Bruxelles qui est en novembre, ce processus de DDR inclusif soit lancé, que tous ceux qui ont quelque chose à dire ou qui ont des attentes puissent s’impliquer dans cet effort-là. Et qu’assez rapidement une évaluation des ressources soit faite. Elle est déjà plus ou moins projetée et qu’on puisse se rendre à Bruxelles pour dire voilà, il est mis en place un processus qui mérite l’appui de la communauté internationale parce qu’il y a une véritable intention des Centrafricains de tourner la page et de rentrer dans un processus DDR. Ça ne va pas être facile, je suis le premier à le reconnaitre. Que l’on ne se laisse pas tromper tous ces appels des sirènes qui visent simplement à créer plus de confusions. Je le redis, les préoccupations des populations dans ses parties revendiquées par certains de groupes armés, les préoccupations sont légitimes. Mais leurs auteurs, ceux qui prétendent en être les représentants n’ont aucune légitimité. C’est donc ensemble avec les autorités, avec les partenaires de la Centrafrique, ceux de la sous-région, avec également une mobilisation de la société civile centrafricaine pour la paix, que personne ne pourra arrêter cette marche vers une Centrafrique nouvelle. C’est ma conviction.

Edouard Dropsy- France 24 : J’ai juste une question, quelle est la position de la MINUSCA concernant l’Union pour la Paix en Centrafrique (UPC) d’Ali Darass à Bambari dans la Ouaka et savoir l’état des négociations avec les groupes armes pour le pré-DDR et le DDR ?

RSSG : Ce que je peux dire assez rapidement sur la situation de ce groupe armé, est qu’il fait partie des groupes armés qui ont signé les accords de Bangui et qui semble être engagé à participer au pré-DDR. Et donc dans ce contexte-là, nous nourrissons de bons espoirs que ce groupe armé important, qu’on ne peut pas négliger, entendra raison et qu’un processus de désarmement, de démobilisation, sera mise en place de manière effective qui viserait justement à étendre l’autorité de l’état dans cette partie, même s’il y a une présence. Cette cohabitation est simplement de mon point de vue inacceptable sur le long terme. Et donc moi, j’ai dans l’espoir que le processus là mise en place par le Chef de l’état aboutira à rendre les armes, à amener ce groupe à rendre les armes et à s’intégrer dans ce processus dans lequel la MINUSCA sera garante de la sécurisation de l’ensemble des acteurs sur le terrain et des populations.

Paul Crescent B. -Emissaire : Je tiens d’abord à vous remercier pour la clarté de votre intervention qui nous ont permis de lever quelques incompréhensions du point de vue analytique. J’ai deux questions et une préoccupation, au sortir de laquelle je poserai une autre question.

La première est celle de savoir si Est-ce que vous mettez de côté l’hypothèse du désarmement forcé, selon laquelle les groupes refusent le désarmement volontaire ?

La deuxième porte sur l’information qui nous ait parvenu au niveau de la rédaction, nous sommes en train de vérifier les faits. Il me semble que l’ancien président Michel Djotodja serait à Ndélé. Est-ce que vous avez la confirmation de cette information au niveau de la MINUSCA?

Et ma préoccupation est la suivante : sur ce qui a été dit par mes confrères sur le fait que vous soyez remonté contre la presse. Je me pose également une question. Est-ce que vous au niveau de la Minusca vous essayez de comprendre le ras le bol de la population, mais aussi les dires et les non-dits de nos autorités, parce que très souvent la presse part de ce fait pour poser une analyse et qui reste une analyse qui n’est qu’une vue à partir d’un point et vous ne pouvez pas partager cette analyse. A titre d’exemple : les déclarations relatives à l’évènement de Sibut. Les mots qui ont été utilisés par certaines autorités de mon point de vue ont été bien choisis et à dessein. Et nous faisons une analyse de ces mots, on se rend compte que les relations ne sont pas au beau fixe comme vous l’avez dit. Est-ce qu’il n’y a pas les non-dits du côté de ces autorités, ce n’est pas cela qui entraine la presse dans ces analyses qui sont aujourd’hui sujettes à débat ?

RSSG : Ecoutez, vous avez posé des questions extrêmement importantes et intéressantes. Ce que je peux simplement vous dire, c’est que comme dans toute famille, les malentendus ça existent. Absolument et surtout quand on est dans une famille qui vit dans un environnement si difficile, quand on est dans une famille où malheureusement parfois souvent la rumeur précède les faits, ce n’est pas facile, je le reconnais. Maintenant le principe que nous au niveau de la Minusca nous avons adopté, c’est un principe simple. Nous avons la chance et le privilège d’avoir accès aux plus hautes autorités du pays. Et je crois que c’est une très bonne chose dans nos rapports. Il nous faut nous parler, parce que c’est en nous parlons qu’on peut mieux se comprendre. Et nous avons accès les uns les autres. Et quand on se retrouve entre quatre murs, voilà parfois, comme on dit en famille, le linge sale on le lave en famille. Donc on se parle. Donc on se parle, on se dit, on lève un certain nombre de malentendus. Et voilà c’est le principe que nous avons et ce qui nous empêche de nous plaindre des uns ou des autres en public. Donc c’est un devoir de retenu, c’est une obligation de retenu qui est extrêmement importante dans le travail que nous faisons. Et vous savez la confiance, elle se construit et moi je comprends, donc je comprends absolument les frustrations de la population. Je comprends d’autant plus que le sort qui est donné à vivre à beaucoup de nos populations est simplement inacceptable. Et voilà pourquoi moi je lance toujours un défi à ceux-là même qui se revendiquent être des leaders, mais dont la légitimité ne repose que sur les armes. Je doute de ce leadership. Je doute de tels centrafricains qui prennent en otage d’autres centrafricains. C’est lamentable. Alors vous m’avez posé la question de savoir si, que fait-on, si certains groupes ne veulent pas accepter le désarmement tel que proposé par le Chef de l’Etat et mis en place et appuyé par la communauté internationale. Le Conseil de sécurité y répond. On le trouve au paragraphe 34 alinéa 8. Je peux le lire. Il nous ait demandé "de saisir, confisquer et détruire activement selon qu’il conviendra, les armes et les minutions des éléments armés et y compris de toutes les milices et autres groupes armés non étatiques qui refusent de déposer les armes ou qui ne l’on pas encore fait".

Donc cette heure de vérité, elle viendra, mais ne précipitons pas les faits. Les étapes qui ont été mise en place par les autorités est la bonne étape. Vous savez c’est plus facile de faire la guerre que de faire la paix. Et ce qui a fait mal à ce pays, vous savez, vous avez certainement, vous connaissez certainement cette pensée qui est dans le patrimoine universel de Victor Hugo qui disait que les rois ont des soldats comme des enfants ont des jouets. Peut-être ce qui a causé tant de problèmes à beaucoup de nos pays, parce que si on utilise une armée comme un jouet, parfois les jouets ça se cassent. Et des jouets comme çà sont très dangereux pour la population. Donc ce qu’il faut éviter c’est qu’au fond, on habitue la population à penser que l’armée est un jouet. Et que l’usage de la force violente est la solution à tous nos problèmes. Mais le moment venu lorsque toutes les voies de recours auront été épuisées lorsque la main tendue a été offerte et rejetée, je suis le premier à dire qu’il n’y aura pas d’autre option, que de se démettre ou d’accepter l’expression de la force, c’est aussi une partie de notre mandat. Merci beaucoup.

Albert Mbaya – Agora : Permettez-moi, juste une contribution, ensuite je poserai ma question, parce que ma question sera construite à partir de la contribution. Je veux parler de la cohésion. Je vous ai suivi avec attention et la question de la cohésion sociale me préoccupe parce que, quelque-part c’est peut-être le point de tous nos malentendus. Mais permettez-moi de dire que le centrafricain aujourd’hui vit une profonde frustration. Parce qu’on se demande, la cohésion sociale avec qui ? Cette question, il faut se la poser d’une manière sincère. Et avec votre permission je veux prendre un exemple. Il y a trois semaines il y a eu un attentat à Nice, où un Monsieur au volant d’un gros camion s’est mis à écraser les gens, sur son passage. Est-ce qu’on peut demander aux Français de faire la cohésion sociale avec ce monsieur ? Je sais que c’est une question qui va faire rire. Et je ne sais pas si aujourd’hui on peut demander aux Centrafricains d’accepter la cohésion sociale avec les Ougandais de la LRA, qui depuis bientôt 10 ans, tuent, pillent, violent, massacrent les centrafricains, dans le Haut Mbomou et se sont payés le luxe d’aller jusque dans la Vakaga, c’est connu ! Est-ce qu’on peut demander aux gens : "faites la cohésion sociale avec ceux-là ?" Voilà Monsieur le Représentant spécial. Je rappelle ces deux exemples pour que vous compreniez ce qui se passe dans le subconscient collectif des centrafricains.

Moi qui vous parle, j’ai 53 ans. J’ai grandi dans ce pays, j’ai étudié ici et je peux vous dire que quand j’étais jeune au lycée, on pouvait voyager à pied de Bangui à Bambari, de Bangui à Bouar et les Centrafricains pouvaient aller dormir chez n’importe qui. Et lorsque les gens parlaient d’ethnie, c’était pour blaguer. Les gens se mariaient dans tous les sens. A Bangui, les gens s’amusaient jusqu’au petit matin. Il y a des quartiers où les gens ne dormaient pratiquement jamais.

La gaffe est arrivée quand ? Lorsque Djotodia arrivait au pouvoir, il a avoué heureusement qu’ils étaient 3 000, mais il s’est retrouvé avec 20 000 combattants à Bangui, il ne savait pas d’où est ce que tout ce monde venait. Et dans les rangs de la Séléka, on s’est retrouvé avec des tchadiens, des soudanais, des maliens, des libyens, tous mercenaires. Ces gens sont venus en RCA, ils sont allés dans le Sud-ouest, ils ont commencé à massacrer les éléphants, d’autres sont tombés amoureux du diamant et ont juré de ne plus jamais rentrer chez eux. Et, vous remarquerez qu’avec l’évolution, les centrafricains Séléka, qui ont compris leurs erreurs se sont regroupés ils sont au Camp Beal, d’autres sont rentrés au quartier. J’ai des amis professeurs, Séléka, qui ont regretté, et qui, maintenant sont dans les quartiers. Du coup, des gens qui hier étaient avec Djotodia, massacraient la population au vu et au su de tout le monde, on s’est rendu compte qu’ils ne parlaient ni Sango, ni Français, et n’avaient aucun repère. Monsieur le Représentant spécial, si vous arrivez chez nous, chaque village porte le nom d’un cours d’eau, d’un arbre ou d’une montagne. Chaque Centrafricain a un repère anthropologique incontestable. Ces gens aujourd’hui, je peux vous dire que si on retrouve ces tueurs-là, ils ne connaissent pas nos villages et ne sont pas des nôtres.

Malheureusement, je fais une confession, sous le régime passé, sous Bozizé, nos autorités avaient pris le goût de vendre nos pièces d’identité à des gens qui étaient du Tchad, du Mali, du Soudan… des gens qui débarquaient à Bangui avec nos cartes d’identité et qui ne savaient même pas parler Sango. Et, le pays a été envahi de cette manière-là. Maintenant que ces gens sont arrivés, ils ont imposé le crime comme modèle. Voilà la raison pour laquelle il y a ce problème de fond. Avec qui faire la cohésion ? Si au moins ces gens-là acceptaient d’être humble pour dire 'écoutez, votre pays est tellement riche qu’on peut vivre ici ", mais qu’ils laissent les populations vivre tranquillement. Maintenant, la cohésion sociale, avec qui la faire ? Avec nos frères qui ont pris les armes et qui ont décidé de renoncer, ou est ce qu’on doit s’obliger de vivre avec ceux qui vont continuer à nous tuer, comme la LRA dans le Haut Mbomou ? Ou tous ces gens comme Ali Darass qui vient du Niger s’impose, se prend pour un Centrafricain, et personne ne l’accepte aujourd’hui ? Voilà le vrai problème Monsieur le Représentant.

Alors ma question est la suivante, la MINUSCA a-t-elle fait un effort pour identifier les véritables auteurs des violences dans ce pays ? Y-a-t-il une cartographie des vrais auteurs, on le sait, qui ne vont jamais accepter le DDR ? Parce qu’après le DDR, ils ne vont plus continuer à piller le diamant, à tuer les éléphants ? Est-ce que ce travail a été fait ?

RSSG : Je crois qu’il me faut rapidement apporter quelques clarifications. D’abord à notre ami, nous n’avons pas de confirmation de la présence de Monsieur Djotodia à Ndélé. Je l’aurais dit si c’était le cas.

Vous avez mentionné la LRA et vous avez absolument raison. Vous savez, la route de la justice, comme la route de l’histoire est parfois longue, mais un jour, elle s’impose. Personne n’aurait su que Monsieur Bemba serait aujourd’hui à La Haye et répondrait de son forfait, pour les crimes commis par ses hommes ici, sur cette terre de Centrafrique. L’arrêt rendu par la Cour est arrêt historique, parce qu’il dit très bien qu’il ait été lui-même auteur direct ou qu’il ait commandité, ça veut dire que sa responsabilité est établie. Il doit répondre de ses actes et c’est à ce titre qu’il a été sanctionné. Il y aura d’autres Bemba dans ce pays, on les connaît, ils vont répondre un jour ou l’autre de leur forfait. Entre temps, c’est vrai et on peut le déplorer, des centrafricains ont perdu la vie, et nous faisons tout ce que nous pouvons, à travers notre présence pour éviter que cela ne prenne des proportions de nature à causer de nouveau déplacement massif de population et de perte en vies humaines. Nous nous sommes engagés dans cet effort et je suis absolument d’accord avec vous pour dire que ceux peuvent être considérés comme de vrais corps étrangers qui ont pris la Centrafrique en pâture, ceux-là, devraient être combattus par la Communauté internationale.

C’est ce qui se fait aujourd’hui du côté d’Obo, qui est un sujet délicat. C’est une situation qui préoccupe le gouvernement, tous les acteurs sur le terrain, la MINUSCA dans une certaine mesure parce que nous n’avons pas une responsabilité directe de cette zone pour l’instant mais le Conseil de sécurité est absolument saisie de cette question. C’est le mécanisme de l’Union africaine qui a la première responsabilité sur le terrain mais nous travaillons en étroite collaboration avec eux. Nous avons perdu il y a deux mois, un soldat marocain à Rafai qui s’est fait assassiné.

Tout ceci pour dire que tous les efforts sont faits pour contenir l’action de ses éléments nocifs de la LRA. Et, la cohésion sociale dont il s’agit, non pas avec ceux-là, ni avec ceux qui vont refuser la main tendue du gouvernement. Non, il ne peut pas y avoir de cohésion sociale avec ceux qui ont choisi le mode de la violence comme mode d’expression et mode d’existence. Ce n’est pas possible. Pour qu’il y ait cohésion sociale, il faut qu’il y ait à un moment donné une volonté de déposer les armes.

Sur ce point, il est important de souligner que malheureusement et c’est peut-être un danger qu’il faut éviter, c’est l’amalgame. J’ai dit hier dans une réunion que j’ai eue avec la société civile, j’ai compris et j’ai senti le besoin de poursuivre ce type de conversation entre les acteurs de la société civile. Parce qu’il y avait eu encore beaucoup trop de malentendus. Et le glissement facile entre ceux qui, aujourd’hui, ont continué d’exprimer leur revendication par le moyen de la force, et le glissement trop rapide en les assimilant, parce qu’ils appartiennent à une communauté, que tous les membres de la communauté pensent exactement la même chose. Vous étiez avec nous quand le 13 décembre, la MINUSCA a permis à des communautés, de voter sous les balles, parce qu’elles étaient prises en otage par leurs propres confrères, dans leur propre arrondissement. Pour dire que, ce pour quoi qu’on dût être ensemble, mobilisé pour mener cette lutte, qui viserait précisément, à séparer le bon grain de l’ivraie et traiter l’ivraie comme elle le mérite.

C’est peut-être par ces mots que vous me permettrez de prendre congé de vous, parce qu’on vient de me rappeler qu’il y a des personnes qui m’attendent. Mais je veux en profiter peut-être pour lever toute équivoque sur le fait que même si l’effet de ma frustration a laissé transparaître ma passion, je partage la frustration des populations. Je ne peux pas me satisfaire de l’action de notre Mission, dont je comprends la difficulté, qui est multiforme si étant que les populations centrafricaines elles-mêmes ne seront pas satisfaites. C’est notre engagement, c’est notre mission, et auprès des autorités centrafricaines. En tout cas, je tiens à vous remercier de votre temps.

Merci beaucoup !

Le 26 août 2016